Un projet législatif circule à l’Assemblée Populaire Nationale : le texte élargit les motifs autorisant la déchéance de nationalité algérienne.
Des citoyens binationaux ou non, accusés d’actes nuisant aux intérêts du pays depuis l’étranger, pourraient perdre leur passeport. Une proposition qui rappelle un débat déjà ancien, mais qui resurgit avec une nouvelle vigueur en octobre 2025.
Le député Hichem Sifer, rapporteur du texte, en a détaillé les contours vendredi 24 octobre 2025 sur la chaîne Echorouk. Sont visés ceux qui commettraient des « actes portant un préjudice grave aux intérêts de l’État », tenteraient de « porter atteinte à l’unité nationale » ou « manifesteraient une allégeance à un État étranger en persistant à rejeter la loyauté envers l’Algérie ». Des formulations larges qui laissent place à l’interprétation.

Le projet prévoit plusieurs cas précis. Fournir des services à un État tiers dans l’intention de nuire aux intérêts algériens. Maintenir une activité au sein de forces militaires ou sécuritaires étrangères, même après avertissement formel du gouvernement. Participer, financer ou faire la propagande d’un groupe terroriste ou subversif. Des accusations lourdes qui appellent des preuves solides.
Cette question avait déjà secoué l’Algérie en 2021. Un avant-projet similaire, présenté en mars par le ministre de la Justice Belkacem Zeghmati, avait provoqué un tollé. Le texte arrivait au moment où le mouvement du Hirak reprenait ses manifestations, soutenu par une part de la diaspora.
Le président Abdelmadjid Tebboune avait finalement retiré le projet en avril 2021, invoquant « son interprétation erronée ». « La double nationalité ou la plurinationalité n’est pas un crime », avait-il alors précisé.
Mais voilà que le sujet revient. Enfin, quatre ans après. Le contexte a changé, certes. Le discours présidentiel sur les « agents » et les « traîtres de la maison » résonne encore. Les autorités pointent du doigt des individus installés à l’étranger qui mèneraient, selon elles, une guerre médiatique contre le pays. Des youtubeurs, des militants, des opposants. Certains ont déjà fait l’objet de mandats d’arrêt internationaux.
Le projet ne distingue pas entre nationalité acquise et nationalité d’origine. Les deux peuvent être visées. Une différence notable avec les textes antérieurs qui limitaient généralement la déchéance aux seuls naturalisés. Le projet algérien va plus loin.
Les promoteurs du texte insistent sur des garanties juridiques et le respect du statut des concernés. Mais les notions d’« allégeance à un État étranger » ou de « collaboration avec une entité hostile » restent floues.