Tayeb Benabderrahmane, lobbyiste franco-algérien qui a été détenu au Qatar début 2020, a déposé plainte, ce jeudi 12 décembre 2024 devant la Cour de justice de la République (CJR) à Paris, contre l’ex-ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, pour omission de porter secours, ont annoncé ses avocats.
Dans un communiqué, Mes Romain Ruiz et Luke Vidal ajoutent que cette plainte auprès de la CJR, seule juridiction habilitée à juger des membres du gouvernement actuels ou passés dans l’exercice de leurs fonctions, vise également la mise en danger de la vie d’autrui et le refus de réponse à des réquisitions judiciaires.
“Après avoir été arrêté, enlevé, séquestré, torturé puis condamné à mort au Qatar” en 2020, “M. Benabderrahmane croyait pouvoir compter sur la protection de la France”, écrivent les conseils.
“Le Quai d’Orsay a été informé, au plus tard le 5 mars 2020, de la détention arbitraire de M. Benabderrahmane puis des graves violations de ses droits fondamentaux”, poursuivent-ils.
“Tant le ministère que les autorités consulaires françaises se sont pourtant sciemment abstenus de lui porter assistance et, pour Mme Colonna, de l’alerter par la suite sur l’existence d’une procédure pénale engagée à son encontre par le Qatar”, dénoncent les avocats.
“Malgré un courrier officiel qatari” de juillet 2023, “Mme Colonna s’est ensuite volontairement abstenue d’alerter M. Benabderrahmane sur sa condamnation à mort, lui faisant dès lors courir un risque létal évident”, accusent Mes Romain Ruiz et Luke Vidal, évoquant une “collusion entre les autorités françaises et le pouvoir qatari”.
En septembre 2023, le ministère des Affaires étrangères avait indiqué que ses services n’avaient “été saisis d’aucune demande de protection consulaire au bénéfice de M. Benabderrahmane en 2020”.
Sollicité jeudi par l’AFP, un porte-parole du Quai d’Orsay a dit n’avoir pas de commentaire à faire sur une plainte.
Tayeb Benabderrahmane, 43 ans, a été arrêté en janvier 2020 au Qatar sur des soupçons d’espionnage au profit d’un Etat étranger et dénonce depuis avoir subi sur place des tortures et une séquestration.
Après plusieurs mois de détention puis une assignation à résidence, M. Benabderrahmane a quitté le Qatar en novembre 2020, après s’être engagé dans un accord à ne pas divulguer des documents potentiellement compromettants pour le patron du PSG Nasser al-Khelaïfi, surnommé “NAK”, sous peine de devoir lui verser 5 millions d’euros.
L’entourage de “NAK” conteste les accusations et affirme que Tayeb Benabderrahmane pouvait se déplacer, téléphoner et avoir accès à ses comptes bancaires et à ses avocats, français et qataris, lors de son assignation à résidence.
Une instruction judiciaire est en cours à Paris depuis février 2023.
© AVEC AFP