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Au rendez-vous culturel et linguistique sino-africain : mille secrets aux présents

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De gauche à droite : Djalilou Adam-Djobo, Geneviève Afi Kassegne, Justin Yao Bossou
De gauche à droite : Djalilou Adam-Djobo, Geneviève Afi Kassegne, Justin Yao Bossou

‘Nous avons partagé un passé mémorable (…) Nous vivons un présent splendide. L’amitié sino-africaine s’épanouit grâce à la diligence des peuples chinois et africain. L’avenir s’annonce radieux (…)’

Cet extrait du discours de l’ancien Président chinois, Jiang Zemin, prononcé il y a vingt ans (mai 1996) lors de son passage au siège de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), à Addis-Abeba, est plus que d’actualité.

Il se traduit aussi bien aux plus hauts sommets des États africains par les bonnes relations bilatérales que dans leurs universités à travers les ‘softpower’ chinois : les Instituts Confucius (pinyin : kǒngzǐ xuéyuàn). Ces établissements culturels publics à but non lucratif destinés officiellement à former des étudiants africains en langue et à la culture chinoises pour contribuer à la consolidation et au développement de l’amitié entre les deux peuples.

Le Togo n’est pas du reste. Il dispose d’un Institut Confucius depuis 2009 au sein de son plus vieux temple du savoir, l’Université de Lomé ; et qui, depuis le mois de septembre 2015, s’est offert des locaux plus grands et plus espacés splendidement nichés au campus sud, tout près de la Faculté des Lettres et Sciences humaines.

Mercredi 17 février 2015, il est 10 heures et demie. Comme il a été prévu, il y a quelques jours, nous rencontrons les trois étudiants de l’Institut Confucius de Lomé sélectionnés pour répondre à nos questions sur les raisons de cet intérêt particulier porté à la langue et la culture de l’Empire du milieu.

Quelques minutes plus tôt, ils s’exprimaient couramment et passionnément en langue chinoise avec leur lăoshī (pinyin chinois du mot enseignant). Ce qui n’est pas surprenant, quand on sait qu’ils font partie du groupe des étudiants de l’Institut devant se rendre en Chine cet été pour un voyage d’études.

Geneviève Afi Kassegne, Assistante de direction bilingue (français/anglais) ; Djalilou Adam-Djobo, étudiant en électrotechnique ; et Justin Yao Bossou, étudiant à la Faculté des Sciences économiques, trois jeunes aux horizons différents, mais réunis et unis par l’attrait à la Chine, sont nos interlocuteurs du jour.

Le comment de l’arrivée du déclic de l’intérêt pour la Chine ?

La question du déclic pour cet intérêt particulier à la langue et à la culture chinoises semble donc utile au vu de la diversité des parcours initiaux de nos interlocuteurs.

Djalilou Adam-Djobo
Djalilou Adam-Djobo

Pour Djalilou, c’est bien le hasard des choses. « J’ai fait la série S au lycée, je ne suis donc pas de nature tourné vers les langues. C’est au décours d’une discussion avec un ami qui m’avait dit qu’apprendre la langue chinoise à l’Institut pourrait m’offrir l’opportunité d’aller un jour en Chine. Un tremplin pour l’amélioration dans le domaine de l’électrotechnique que je suis.»

Pour Geneviève, c’était pour se rendre utile à une amie chinoise. « Quand je préparais mon diplôme au Village du Bénin à l’Université de Lomé, j’ai fait la connaissance d’une Chinoise qui avait bien des difficultés à se faire comprendre et à s’exprimer en français ou en anglais (…) Elle m’avait donc demandé d’apprendre sa langue pour pouvoir l’aider. Donc après le Village du Bénin, je me suis inscrite ici (…) Par la suite, j’ai compris que cela m’ouvrait d’autres horizons. »

En ce qui concerne Justin, il avait déjà fait son plan avant de s’inscrire. « Je voudrais poursuivre mes études à la FASEG et avoir un Doctorat. Après la Licence, ce que j’apprenais à la Fac n’était pas très pratico-pratique. Donc il fallait m’offrir d’autres horizons afin de gagner de l’argent et financer mes études (…) Quand j’ai commencé, j’ai aimé et je poursuis parallèlement à ma Fac.’

Mais pourquoi le choix précis de l’Institut Confucius pour l’apprentissage et ce qui se fait ?

Ils sont nombreux, en réalité, ces centres à Lomé qui claironnent leurs sirènes des offres de formation en langue chinoise. Mais le choix de l’Institut de Confucius par nos interlocuteurs se justifie par moult motivations diverses et variées.

Djalilou nous éclaire : « Vous savez, les autres centres qui existent ne garantissent pas la même qualité. Par exemple, il y a certains de mes camarades ici (4ème niveau) qui vont enseigner dans ces centres (…) Alors qu’ici, ce sont des enseignants chevronnés qui sont spécialement formés pour enseigner la langue et la culture chinoises aux étrangers. Et aussi, nous faisons partie du réseau mondial des Instituts Confucius placé sous la responsabilité du Hanban (le Bureau de la Commission pour la diffusion internationale du chinois) dont le siège se trouve à Pékin.»

Geneviève, pour sa part, ne passe par quatre chemins et est assez pragmatique sur le sujet : « Je ne peux pas aller chercher ailleurs alors que le meilleur est à ma portée. »

Le contenu de la formation est aussi attrayant. Il se fonde sur une notion empirique pour l’acquisition des connaissances, sur une civilisation comme nous l’indique Geneviève : « Pour acquérir la culture d’une civilisation, on ne peut pas dissocier la langue de la culture. »

« C’est dans ce sens que pour l’apprentissage, il y a des cours qui portent sur le lexique, la calligraphie, l’écriture des caractères, l’expression, la poésie ; et certains sur la danse, la gastronomie, l’art martial (…) Ces cours se font d’une manière séparée, puisque nous sommes étudiants pour nous permettre d’être imprégnés de la culture chinoise », a-t-elle ajouté.

Geneviève Afi Kassegne
Geneviève Afi Kassegne

Les plus-values de la connaissance de la langue chinoise

Pour un profane, l’apprentissage de la langue chinoise pourrait simplement être un tremplin pour voyager sur l’Empire du milieu. Mais à bien y regarder, les opportunités que cette ouverture offre sont aussi variées que nombreuses.

Du commerçant à l’étudiant, en passant par le diplomate, les opportunités sont nombreuses à saisir avec la première puissance mondiale depuis août 2015 selon le Groupe de la Banque mondiale.

Pour nos interlocuteurs, c’est une manne, une véritable aubaine, comme ils l’expliquent à juste titre.

Pour Justin, « Etant donné que je comprends la langue, et je maitrise le français, je donne des cours de la langue française aux ressortissants chinois au Togo. Une façon pour moi d’arrondir mes fins de mois. Il y a aussi l’aspect des bourses et le voyage d’études que nous effectuerons. »

Pour Djalilou, « Dès que vous commencez, même si vous ne voulez pas, les Chinois viennent vous chercher pour travailler avec eux, quel que soit votre niveau d’expression. Même quand j’étais au niveau 2, on me faisait appel, j’étais réticent au début de peur de laisser mes études pour de l’argent. Mais actuellement, je fais les deux. »

Geneviève n’est pas du reste : « Quand je suis venue à l’Institut, l’objectif n’était pas de faire de la langue chinoise une langue de travail, mais aujourd’hui, j’ai eu beaucoup d’opportunités. J’ai profité pour travailler comme interprète les dernières vacances pour gagner de l’argent. »

Les Instituts Confucius pour renforcer les liens entre les deux peuples

‘Les jeunes sont l’avenir du pays, de la nation, et de la coopération internationale’, a déclaré le diplomate chinois au Togo, M. Liu Yuxi le 18 février dernier lors de sa visite à la Maison des jeunes de Lomé.

Cet extrait rend compte de l’importance de la place de la jeunesse dans l’affermissement des liens entre les peuples chinois et togolais.

Pour nos interlocuteurs du jour, apprendre la langue chinoise servirait à raffermir les liens de partenariat dans lesquels sont engagés les deux pays depuis quelques années déjà.

Justin Yao Bossou
Justin Yao Bossou

Pour Justin, « J’ai toujours eu envie de servir mon pays. Si par cet apprentissage, je peux être utile, je n’hésiterais pas le moment venu. »

Pour Geneviève, « Lorsqu’il y a un partenariat entre deux pays de cultures différentes, chacun cherche à s’imprégner de la culture de l’autre. Comme cela, il est confiant et c’est un peu cela la force du partenariat international. Si nous, Togolais, ne comprenons pas la langue chinoise, il est évident que nous ne pourrons rien espérer de la relation à notre avantage. Cet apprentissage serait donc utile dans ce sens à mon avis. »

Pour Djalilou, « Les Chinois sont impressionnés de voir un étranger parler leur langue. Du coup, ils vous abordent pour que vous vous échangiez les contacts, parce qu’ils sont persuadés que vous pourriez leur être utile. Cette approche ne peut donc que créer des liens entre les individus et ainsi raffermir la relation de coopération entre nos deux peuples. »

Pour ceux qui hésitent à faire le pas, nos jeunes interlocuteurs les rassurent

Pour Djalilou, « Rien n’est une sinécure dans la vie, surtout si vous voulez réussir. Mais quand vous vous donnez, vous vous rendriez compte que la langue chinoise est facile et très utile pour les affaires et gagner sa vie. »

Pour Geneviève, « Dans la vie, ce qu’on sait ne pèse jamais trop lourd à la tête. Apprendre le chinois n’est pas une perte de temps, comme le pensent certains par mépris. Il y a beaucoup de choses qu’on peut faire avec. Nous vous attendons donc, pour qu’ensemble, nous puissions être les porte-flambeaux de cette relation bilatérale avec la Chine montante.

Xièxie (pinyin du mot Merci) ; bonne et heureuse année du Singe d’or.»