L’annonce d’une allocution du président malgache Andry Rajoelina, prévue ce lundi 13 octobre 2025 au soir, suscite des espoirs de démission à Antananarivo, capitale de Madagascar, parmi les milliers de manifestants encore réunis lundi, libres de défiler depuis le ralliement d’unités militaires ce samedi 11 octobre 2025.
Durant le week-end, Andry Rajoelina, dont la localisation est inconnue, a dénoncé « une tentative de prise du pouvoir illégale (…) actuellement en cours » dans cette île particulièrement pauvre de l’océan Indien, où une partie de l’armée a pris le parti d’un mouvement de contestation né le 25 septembre.
Élu en 2018, puis réélu en 2023 lors d’un scrutin boycotté par l’opposition, il fait l’objet de rumeurs de fuite.

Des remises gracieuses de peine ont été accordées lundi par décret présidentiel à une série de personnes, dont le Franco-Malgache Paul Maillot Rafanoharana, emprisonné depuis 2021 pour tentative de coup d’État, dont le cas était un point de crispation entre les deux pays. L’authenticité du document a été confirmée par une source proche de la présidence.
Ce week-end, une unité militaire, le Capsat, qui avait joué un rôle majeur dans le coup d’État de 2009 d’Andry Rajoelina, à la suite déjà d’une mobilisation populaire, a appelé les forces de sécurité à « refuser de tirer » sur les manifestants, avant de rejoindre ces derniers dans le centre de la capitale malgache.
« C’est tout bizarre, vu qu’on était habitués à toujours être pourchassés et bombardés par des gaz lacrymogènes », témoigne auprès de l’AFP Finaritra Manitra Andrianamelasoa, un étudiant en droit de 24 ans parmi les milliers de manifestants ayant rejoint lundi la place du 13-Mai dans une ambiance de fête, devant l’hôtel de ville d’Antananarivo.
Marchant au rythme d’une fanfare, le cortège a enflé à mesure qu’il approchait de ce lieu symbolique de l’histoire politique malgache, baptisé en hommage aux tués d’un soulèvement populaire en 1972 ayant conduit au départ du premier président.
L’actuel chef de l’État doit s’adresser à la nation à 19 h 00 (16 h 00 GMT), d’après un communiqué diffusé lundi par ses services.
« Nous attendons déjà qu’il s’excuse auprès de tous les Malgaches, parce qu’on a eu beaucoup de blessés. (…) Au tout début, ce qu’on demandait, c’était l’électricité, la liberté de s’exprimer, mais on attend actuellement sa démission », assène Steven Mandimbiarivong Rasolonjanahary, 19 ans, un autre étudiant en droit.
« Plus de dinosaures » après une démission du président à Madagascar
« On attend sa démission mais, le connaissant, je ne crois pas qu’il va dire ça », pronostique Rotsinasandratra Lucas Hantamalala, étudiante de 20 ans. « Plus de dinosaures politiques, s’il vous plaît, on en a assez vus », exhorte-t-elle.
Des soldats ont accompagné samedi dans le centre-ville de la capitale malgache des milliers de manifestants, les rejoignant à nouveau dimanche pour un rassemblement en hommage aux personnes tuées au cours des plus de deux semaines de manifestations.
Le collectif à l’origine des manifestations, baptisé Gen Z, a appelé à un nouveau rassemblement plus tard lundi.
Le mouvement de contestation, qui dénonçait au départ les coupures incessantes d’eau et d’électricité, s’est mué depuis en une contestation plus large du président Rajoelina, 51 ans, et de son clan.
Les manifestants ont obtenu ce week-end le départ du décrié président du Sénat Richard Ravalomanana, ancien commandant de gendarmerie.
Quant au troisième homme vilipendé par la rue, l’homme d’affaires et proche du chef de l’État Maminiaina Ravatomanga, il a fui dimanche matin à l’île Maurice voisine, comme l’a confirmé le gouvernement mauricien.
Surnommé « Général Bomba » pour son recours généreux aux grenades lacrymogènes lors de la crise de 2009, Richard Ravalomanana était accusé par les contestataires d’être un des principaux acteurs de la répression des manifestations ces dernières semaines.
Au moins 22 personnes ont été tuées au début des manifestations et plus d’une centaine blessées, d’après un bilan des Nations unies.
Le chef de l’État a démenti des « chiffres erronés », évoquant 12 morts, tous « des pilleurs, des casseurs », selon lui.
Madagascar, île à la population particulièrement démunie, a une longue histoire de soulèvements populaires suivis par la mise en place de gouvernements militaires.
Au moins 80 % des 32 millions d’habitants de Madagascar vivent avec moins de 15 000 ariary par jour (2,80 euros), le seuil de pauvreté de la Banque mondiale.