Docteure Simone Ehivet Gbagbo a réagi après la proclamation des résultats de l’élection présidentielle 2025.
« Mes chers compatriotes,
Mes chères sœurs, mes chers frères,
Les résultats provisoires proclamés ce jour par la Commission Électorale Indépendante (CEI) ne me placent pas en tête de cette élection présidentielle.
Je prends acte de ces résultats, tout en gardant au plus profond de moi la conviction que le combat que nous avons mené ensemble n’a pas été vain.

Je tiens à remercier le Gouvernement qui a mis à ma disposition des forces de sécurité pour assurer efficacement ma protection durant la campagne présidentielle.
Au-delà des chiffres et des annonces officielles, cette campagne a révélé quelque chose de bien plus profond : la soif de justice, de vérité et de dignité qui habite notre peuple.
Ce que les urnes n’ont pas traduit aujourd’hui, l’Histoire le retiendra : le peuple ivoirien aspire au changement.
Je tiens à adresser un immense merci à tous ceux qui ont cru en nous.
Je veux exprimer ma profonde gratitude aux militantes et militants du Mouvement des Générations Capables (MGC), à nos alliés — le COJEP de Charles Blé GOUDÉ, l’AIRD d’Éric KAHÉ, Objectif République de Paul-Hervé AGOUBLI, ICON de Yves MAYOBO, Pour la Côte d’Ivoire de Viviane PETE, le Sursaut National de Marcellin KOUAMÉ et le Parti Social Démocratique de AKADJE Séraphin — ainsi qu’à toutes les Ivoiriennes et à tous les Ivoiriens qui, malgré les obstacles et la peur, ont eu le courage d’exprimer leur choix.
Votre engagement, votre détermination et votre Foi ont donné sens à ma candidature et à notre combat collectif pour une Côte d’Ivoire réconciliée, transformée et souveraine.
Je suis fière de vous et je vous dis du fond du cœur : Merci.
I- LES RAISONS DES RÉSULTATS ANNONCÉS
Les résultats proclamés aujourd’hui ne reflètent pas fidèlement la volonté populaire. Deux grandes causes expliquent la situation que nous observons :
1. Un système électoral inéquitable et verrouillé
Depuis des mois, nous avons réclamé des réformes profondes pour garantir un scrutin inclusif, transparent et crédible. Le gouvernement nous a opposé une fin de non-recevoir, de sorte que cette élection s’est tenue avec :
– un fichier électoral contesté, truffé de doublons, d’électeurs décédés et de radiations discutables ;
– une Commission Électorale déséquilibrée, où le pouvoir a conservé une influence écrasante ;
– un climat d’intimidation et de violence, qui a privé nombre de citoyens de leur droit de vote.
Dans plusieurs régions du pays — Grands Ponts (Yassap, Orbaff, Gbougbo, N’gatty, Tiaha, Lopou, Youwill), Agneby Tiassa (Grand- Yapo, Seguié, Boguié, Ano), La Mé (Motobé, N’doubato, Minisi, Agou) — le vote n’a même pas pu se tenir.
À Facobly (Sériho), Guiglo, Issia, ou encore dans certaines communes d’Abidjan comme Yopougon (Sideci-Lem, école BAD), des scènes de tension ont empêché le déroulement paisible du scrutin.
Dans plusieurs localités — Akoupé, Afféri, Becouefin, Songon sous-préfecture, Daoukro (EPP Dadiékro), Jacqueville (Atoutou), Yamoussoukro — des troubles, des saccages, des urnes emportées, des attaques contre des locaux et des agents électoraux ont privé des électeurs de leur droit d’expression citoyenne.
Nahio, une sous-préfecture dans le Département d’Issia, est un exemple emblématique où des affrontements communautaires ont occasionné des morts, de nombreux blessés et des destructions de biens que je déplore.
Je m’incline devant la mémoire de toutes ces victimes.
Et pourtant, la CEI évoque un taux de participation supérieur à 50 % — y compris dans des localités où le vote n’a pas eu lieu.
Ce chiffre est manifestement inexact. Nous ne pouvons pas bâtir la démocratie de la sorte.
2. Une opposition divisée dont une partie a créé un climat de peur et de violence
Il faut avoir le courage de regarder la vérité en face. Le changement souhaité par le peuple ivoirien était à portée de main.
Malheureusement, certains acteurs ont privilégié leurs calculs personnels, leur égoïsme et la division, au détriment de l’intérêt du pays. Cette fraction de l’opposition s’est employée à créer la peur, la psychose et la violence, décourageant des millions d’ivoiriens d’aller voter et offrant ainsi sur un plateau d’or à Alassane OUATTARA un quatrième mandat, qu’ils prétendaient pourtant combattre.
Face à cette insécurité organisée, beaucoup de familles ont préféré rester enfermées chez elles plutôt que de risquer leur vie. Oui, nos concitoyens ont choisi la prudence, non par indifférence, mais par peur. Et cette peur, savamment entretenue, a été l’un des instruments les plus puissants de la confiscation du vote populaire. Je condamne avec fermeté ces comportements déloyaux et contraires à l’esprit démocratique.
II- UNE ÉLECTION PROFONDEMENT INÉGALE
Je dénonce également la dérive financière du processus électoral, qui crée une inégalité insurmontable entre les candidats. En effet au-delà de toutes les autres dépenses de la campagne électorale pour simplement assurer la présence de nos représentants dans tous les bureaux de vote, il nous aurait fallu mobiliser plus de 630 millions de francs CFA, chaque représentant coûtant entre 10 000 et 25 000 F CFA selon les zones. Aucune démocratie digne de ce nom ne peut tolérer ni supporter une telle injustice structurelle.
III- DES RÉFORMES À ENGAGER ET L’APPEL AU DIALOGUE NATIONAL
Je réaffirme ma détermination à poursuivre le combat pour une réforme profonde du système électoral. La Côte d’Ivoire ne pourra pas bâtir une démocratie durable tant que :
– les institutions électorales resteront sous tutelle politique ;
– le financement des campagnes ne sera pas équitablement régulé ;
– la transparence des résultats ne sera pas garantie par la loi et la
Technologie.
Je demande l’ouverture d’un Dialogue National inclusif, pour restaurer la confiance, recoudre le tissu social et panser les blessures de notre Nation. Ces blessures — faites d’exil, d’humiliation, de divisions et de prison — ne guériront ni par la force ni par le silence, mais par la vérité, la justice et le pardon mutuel.
Je sollicite la clémence du Président de la République pour la libération de toutes les personnes arrêtées et non encore jugée et l’amnistie ou à défaut la grâce présidentielle pour toutes les personnes déjà jugées et condamnées dans le cadre de cette élection : militants, délégués ou simples citoyens. Aucun Ivoirien ne doit être emprisonné pour avoir exercé un droit démocratique.
IV- UNE FOI INTACTE DANS LE DESTIN DE LA CÔTE D’IVOIRE
Mes chers compatriotes,
Je tends la main à tous : au vainqueur du jour, aux partis politiques, à la société civile, aux jeunes, aux femmes, aux chefs traditionnels et aux religieux.
Unissons nos intelligences et nos cœurs pour rebâtir notre pays sur des bases morales, souveraines et dans la solidarité.
Je l’ai déjà dit et je le répète : ma vie entière est un engagement pour la liberté, la dignité et la souveraineté de notre peuple. Je continuerai à me battre, avec la même détermination, pour l’idéal de société que je porte : une Côte d’Ivoire réconciliée, totalement transformée, souveraine et fière de son identité africaine.
Le chantier continue. Et tant qu’il y aura dans ce pays des hommes et des femmes debout, rien ne sera perdu.
Je vous remercie », a déclaré Docteure Simone Ehivet Gbagbo.