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Éradication des mariages d’enfants au Mali et au Togo : les principaux acteurs font le point des initiatives

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La prévalence du mariage des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre est de 41 %, ce qui signifie que quatre filles et jeunes femmes sur dix, soit près de 60 millions d’individus de petites filles et de jeunes filles, ont été mariées avant l’âge de 18 ans en Afrique de l’Ouest.

Ces chiffres qui émanent d’une étude réalisée par l’UNFPA et l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre masquent toutefois d’importantes disparités entre les pays, voire à l’intérieur d’un même pays.

Dans le cadre de la coalition Synergie d’Actions pour une lutte plus efficace contre les Mariages d’Enfants (SAME), les réseaux nationaux au Mali et au Togo du WiLDAF-AO et leurs partenaires AMSOPT (Mali), et FAMME (Togo), ont initié depuis juillet 2018 un projet sous-régional intitulé : « Améliorer la capacité des jeunes actrices engagées pour l’éradication des mariages d’enfants en Afrique de l’Ouest », financé par l’Africa Women’s Development Fund (AWDF) dans le cadre de l’initiative « Le Sud aux Rênes du Leadership ». Ce projet vient renforcer les actions et engagement du réseau à œuvrer pour la fin des mariages des enfants en Afrique de l’Ouest depuis 2016.

Après plus d’une année de mise en œuvre du projet, une rencontre d’échanges, d’évaluation interne des activités du projet et de partage d’expérience s’est tenue les 3 et 4 mars au siège du WiLDAF-AO à Lomé. Elle a regroupé les chargées de Programme du WiLDAF Mali et Togo, les chargés du suivi d’AMSOPT et de FAMME, ainsi que 4 filles provenant des zones ciblées par le projet à savoir Kayes et Nioro au Mali ; Tamongue et Lama Téssi, au Togo.

Concrètement, il s’est agi pour les participants d’évaluer – en plénière et en groupe de travail – les actions menées depuis le démarrage du projet, les difficultés rencontrées, les stratégies adoptées pour surmonter ces dernières, les leçons apprises, ainsi que la synthèse des résultats obtenus.

Pour M. Bréhima Ballo, le chargé de programme à AMSOPT au Mali, « ces deux jours ont été très enrichissants pour nous qui sommes acteurs de mise en œuvre de ce projet. C’est une rencontre bilan de ce qui a été fait, les succès enregistrés et les difficultés rencontrées. Nous avons fait une revue critique du projet pour voir ce qu’il faut améliorer pour l’atteinte des objectifs ».

Revenant sur le rôle d’AMSOPT dans la mise en œuvre du projet pour la fin des mariages des enfants, M. Bréhima Ballo a fait comprendre qu’ils interviennent particulièrement pour renforcer le volet santé de la reproduction (SR). « Les volets SR » contiennent les sensibilisations et la prise en charge des thématiques de planification familiale, d’IST et du VIH/SIDA, la maternité infanto-juvénile, et le suivi de la grossesse. AMSOPT renforce la capacité de communication des filles sur la santé de la reproduction, les violences faites aux femmes, les droits humains, pour que celles-ci puissent sensibiliser d’autres personnes au sein de la communauté afin de promouvoir l’abandon du mariage des enfants », a-t-il ajouté.

Avant de préciser que son organisation intervient également dans le lobbying et les plaidoyers auprès des leaders communautaires au niveau national pour amener les législateurs à modifier les lois en faveur de la lutte contre la violence basée sur le genre le mariage d’enfants.

En ce qui concerne les  majeures rencontrées dans l’exécution du projet dans les différentes localités, tous s’accordent à dire qu’elles sont relatives aux réticences de certains leaders communautaires et religieux face à l’abandon de l’excision et des coutumes qui découlent du Coran.

Mme Pounpouni Adidjatou, chargée de programme au WiLDAF-Togo, a quant à elle affirmé que Lama Téssi par exemple, est une zone fortement islamisée où la croyance est basée sur le fait qu’il faut donner la jeune fille en mariage dès l’apparition de sa troisième menstrue. Faire évoluer ou abandonner ces pratiques ou coutumes préconçues fortement ancrées dans la communauté n’est pas chose aisée, mais des actions de formation et de sensibilisation sont menées pour changer sensiblement la situation.

Comme le témoigne également Mlle Idrissou Moubachara, élève en classe de 2nd à Lama Téssi, qui a été formée dans le cadre du projet et qui représente le groupe des filles leaders de sa localité, « avant le projet, les parents donnaient les filles en mariage en désordre parce qu’elles ne restent pas tranquilles et ne comprennent pas leurs conseils. On pratiquait la coutume du Coran qui dit qu’à la troisième menstruation, la fille doit se marier. Avant aussi, la femme n’a pas le droit de s’exprimer dans la maison, seuls les hommes sont mis en valeur. Mais, maintenant, la situation a beaucoup changé grâce à ce projet. Les filles sont libres de continuer leurs études et de vaquer à une autre occupation outre celles de la maison », a-t-elle expliqué.

La situation du mariage des enfants étant très préoccupante dans la sous-région ouest-africaine, les actions sont menées par différentes organisations qui ont compris la nécessité de mener la lutte ensemble à travers des alliances et des partenariats pour lutter efficacement contre le phénomène ; c’est l’idée qui avait prédominé l’organisation en octobre 2017 à Dakar, la rencontre organisée par la Coalition ouest Africaine composé des institutions des Nations Unies et autres partenaires de la société dont le WiLDAF-AO pour mettre fin aux mariages des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre.

A travers l’expérience acquise, les acteurs de cette lutte contre le mariage des enfants au Mali et au Togo pensent que le meilleur moyen reste et demeure les actions de sensibilisation et de renforcement de capacités des acteurs et des groupes cibles. La rencontre d’échange a été d’une grande importance car elle a permis aux différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre du projet d’évaluer le travail qui a été fait à ce jour pour atteindre les objectifs assignés, de confronter leurs méthodes de travail et enfin de se projeter plus efficacement sur l’avenir avec de nouvelles stratégies consensuelles.