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Etats-Unis : qui est Ketanji Brown Jackson, la 1ère femme noire en lice à la Cour suprême ?

Crédit photo : letemps

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Ketanji Brown Jackson, juriste de 51 ans, a été choisie fin février par Joe Biden pour intégrer la Cour suprême, plus haute instance juridictionnelle des Etats-Unis. Le président démocrate avait promis, pendant sa campagne, de nommer pour la première fois de l’histoire une femme noire au sein du temple du droit américain. En 230 ans d’existence, la Cour suprême a vu 115 juges, parmi lesquels seulement cinq femmes et deux hommes de couleur.

Les 22 et 23 mars, elle a affronté l’examen de sa candidature. En deux jours, elle a dû répondre à 642 questions, dont de nombreuses attaques personnelles. Plusieurs élus d’opposition ont utilisé son audition pour faire résonner leurs thématiques de campagne, à quelques mois des élections de mi-mandat : lutte contre la criminalité, contre l’avortement, traitement des mineurs transgenres…

 

« LES BÉBÉS SONT-ILS RACISTES ? »

 

Le sénateur texan Ted Cruz, connu pour son conservatisme prononcé, l’a lourdement interrogée sur certains penseurs et militants noirs, ou sur sa connaissance de la « théorie critique de la race », qui analyse les aspects institutionnels du racisme. « Les bébés sont-ils racistes ? », lui-a-t’il par exemple demandé. 

« Qu’est-ce qu’une femme ? », a aussi voulu savoir le sénateur texan, voulant tacler les « sensibilités gauchistes modernes », qui permettraient de changer de genre à l’envi. « Je ne suis pas biologiste, a répondu la juge fédérale. Je sais que je suis une femme. Et la femme que j’admire le plus est dans cette salle : ma mère. »

Toujours courtoise et malgré une certaine lassitude, Ketanji Brown Jackson a refusé de se laisser entraîner dans leurs batailles idéologiques, soulignant à plusieurs reprises sa « neutralité », son « indépendance » ou encore son « impartialité ». Le sénateur du Missouri Josh Hawley l’a quant à lui présentée comme une magistrate indulgente envers les pédocriminels.

Il a notamment évoqué le dossier d’un homme trouvé en possession de 6 700 vidéos mettant en scène des enfants, que la juge a puni de cinquante-sept mois de prison, soit un tiers de moins que la peine requise par le procureur. Pendant des heures, les élus républicains ont dénoncé un supposé « laxisme » de la juge Jackson. « Rien n’est plus éloigné de la réalité », a-t-elle dit, expliquant faire « encore aujourd’hui des cauchemars » à cause de ces dossiers.

 

« QUAND JE VOUS REGARDE, JE VOIS MA MÈRE OU MA COUSINE »

 

« Comment osent-ils dire que vous êtes laxiste ? », s’est ensuite étranglé le sénateur noir Cory Booker, notant que la juge Jackson avait le soutien de syndicats de policiers et d’anciens procureurs, et que plusieurs membres de sa famille servaient dans les forces de l’ordre. « Vous êtes ici parce que vous le méritez » et « personne ne me volera ma joie ! », a-t-il poursuivi, dans une envolée qui a arraché une larme à la magistrate. « Je vous le dis, les U.S. seront meilleurs grâce à vous ! »

« J’ai reçu tellement de messages, de lettres et de photos de petites filles de tout le pays qui m’ont fait part de leur enthousiasme », a rapporté Ketanji Brown Jackson. « Parce que je suis une femme, une femme noire, ça veut dire beaucoup pour les gens… ».

 

UN PARCOURS EXEMPLAIRE ET UNIQUE À LA COUR SUPRÊME

 

Sans pour autant insister sur la couleur de sa peau, elle a rendu hommage à tous ceux qui l’ont aidée à se hisser à ce niveau à commencer par ses parents qui, « pour exprimer leur fierté de leur héritage et leur espoir en l’avenir, (lui) ont donné un prénom africain, Ketanji Onyika, signifiant “la charmante”. »

Née après les grandes luttes pour les droits civiques des années 1960, la magistrate a fait part de sa « chance ». Ketanji Brown Jackson a pu fréquenter des écoles mixtes en Floride. Elle était une élève brillante, et s’est distinguée dans des concours d’éloquence. Après des études de droit à la prestigieuse université d’Harvard, elle a mené une riche carrière, notamment comme avocate puis juge fédérale, tout en construisant une famille avec un chirurgien blanc.

Désormais aux portes de la Cour suprême, elle espère que son parcours augmente « la confiance » des Afro-Américains dans le système judiciaire. « Les gens vont comprendre que les tribunaux sont comme eux, que nous les juges sommes comme eux. » Si elle est confirmée (ce qui est quasi assuré) elle est également la première juge de l’instance à avoir une expérience de défense criminelle en tant que « public defender », c’est-à-dire commis d’office pour la défense des justiciables sans ressources.