L’industrie des faux médicaments représente en Afrique 30 à 60% des médicaments mis en circulation selon l’OMS. L’une des raisons de la croissance de ce trafic en Afrique est l’absence dans de nombreux pays d’une législation le criminalisant.
Pour lutter contre ce phénomène, Jean-Yves 0llivier, président de la Fondation Brazzaville, lancera dans quelques semaines à Lomé, une initiative destinée à renforcer la lutte contre le trafic de faux médicaments en Afrique.
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En marge de cette rencontre, Faure Gnassingbé, dans une tribune publiée le vendredi 20 décembre par nos confrères de Jeune Afrique, dresse l’état des lieux et expose sa vision.
Voici l’intégralité de sa tribune.
Depuis des années, un drame humanitaire se déroule sous nos yeux dans l’indifférence ou, pire, dans l’ignorance de la communauté internationale ; une urgence sanitaire qui ne dit pas son nom et dont personne, ou presque, ne parle jamais. Cette catastrophe touche principalement l’Afrique : le trafic de faux médicaments.
Il est temps d’agir ! C’est une ardente obligation. D’abord parce que les victimes se comptent par centaines de milliers chaque année, et que beaucoup d’enfants sont concernés. Ensuite, parce que ce trafic ne cesse de croître, le mal progresse et s’étend partout. Une nécessité, aussi, parce que ce trafic est l’une des sources du financement de la criminalité internationale, notamment du terrorisme, qui fait de trop nombreuses victimes en Afrique mais aussi à l’échelle de la planète.
Oui, le trafic de produits médicaux de qualité inférieure et falsifiés est un scandale humanitaire qui se déroule chaque jour ; il touche des millions de personnes, soit indirectement parce que ces médicaments ne soignent pas ceux qui croient se soigner, soit directement parce que les produits utilisés falsifiés tuent.
Selon les experts, environ 10 % des produits pharmaceutiques vendus dans le monde seraient falsifiés. Sur notre continent, la situation est nettement pire, puisque ce taux atteindrait 60 % dans certaines régions.
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120 000 enfants en meurent chaque année
La conséquence directe de ces chiffres épouvantables est que, chaque année, plus de 120 000 enfants de moins de cinq ans en meurent. C’est un drame humain insoutenable, qui se déroule quotidiennement sous les yeux du monde entier.
Les présidents de six pays d’Afrique – de la République du Congo, du Ghana, du Niger, de l’Ouganda, du Sénégal et moi-même – avons décidé de lancer une initiative africaine pour changer la donne en Afrique.
Dans la prolongation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, adopté par les Nations unies le 25 septembre 2015, nous avons décidé d’agir concrètement pour lutter contre ce trafic et assurer à nos citoyens un accès à des médicaments sûrs.
Nous nous réunirons les 17 et 18 janvier 2020 à Lomé, où je serai fier de les accueillir, pour passer à l’acte et prendre des décisions fortes.
Agir signifie que nous allons, dans le cadre d’un accord intergouvernemental qui nous engage, criminaliser le trafic de produits médicaux de qualité inférieure et falsifiés. Cela suppose de faire évoluer nos législations rapidement, de s’assurer de l’harmonisation des normes de contrôle et de mettre en place des mécanismes visant à assurer l’application rigoureuse des sanctions pénales. Enfin, nous allons également signer et ratifier la Convention Medicrime et la Convention de Palerme contre la criminalité transnationale organisée.
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Traiter le mal à la racine
Il s’agit d’attaquer le mal à la racine et d’assécher les filières de distribution de ces produits dangereux voire mortels. Plus que tout, nous désirons que nos populations aient un accès aux médicaments, mais nous sommes conscients qu’il faut en parallèle éradiquer l’approvisionnement en produits médicaux falsifiés.
Savoir que des mères vont acheter des médicaments qui tueront leurs enfants est insoutenable. Savoir qu’un groupe terroriste se finance en écoulant ces produits est inadmissible. C’est pourquoi ce trafic doit être puni de sanctions pénales très sévères.
Notre détermination est sans faille et c’est la raison pour laquelle notre initiative n’est qu’un début. Nous allons tout faire pour encourager d’autres États à se joindre à cette initiative. Nous comptons sur la Fondation Brazzaville pour poursuivre ses efforts dans la lutte contre ce trafic et, entre autres, jouer un rôle de soutien et de suivi dans cette initiative.
Il s’agit aussi pour nous d’alerter les décideurs internationaux et l’opinion publique du monde entier pour prendre à bras-le-corps ce combat, d’impliquer tous les acteurs possibles, de coordonner les actions des ONG, des entreprises, des organisations internationales et des États pour que ce drame humain cesse enfin.