Après la mise en garde vient la sanction. L’Arcom (ex-CSA) a saisi la justice 8 mars et demande le blocage de 5 sites pornographiques: Pornhub, Tukif, XHamster, Xnxx et Xvidéos. Le gendarme de l’audiovisuel avait adressé une injonction aux plateformes et laissé 15 jours pour se mettre en conformité avec la loi. Les constats d’huissiers reçus par l’autorité montrent que les hébergeurs n’ont pas respecté ces délais.
Depuis le vote de la loi contre les violences conjugales en 2020, un amendement précise que les sites ne peuvent plus se contenter de demander aux internautes de déclarer qu’ils sont majeurs en cliquant sur une simple case. Avec l’entrée en vigueur de cette législation et le décret d’application paru en octobre, l’Arcom a la capacité de saisir la justice. En fonction de la décision du juge, les fournisseurs d’accès à internet seront contraints ou non de bloquer l’accès aux sites incriminés. En cas de blocage, les visiteurs du site pornographique seront renvoyés vers une page dédiée de l’Arcom.
Aucune consigne officielle
Les diffuseurs de contenus pornographiques sont donc tenus, en théorie, de contrôler l’âge de leurs visiteurs. Mais comment ? Il n’existe à ce jour aucune méthode légale pour y parvenir. Le régulateur lui-même n’a jamais donné de lignes directrices aux plateformes.
Dans son avis rendu le 3 juin 2021, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a décrété qu’un système de vérification qui collecte des informations sur l’identité des internautes serait, dans ce contexte, illégal et risqué. « Une telle collecte de données présenterait, en effet, des risques importants pour les personnes concernées dès lors que leur orientation sexuelle – réelle ou supposée – pourrait être déduite des contenus visualisés et directement rattachée à leur identité », alerte le gendarme des données privées.
Face à ces contradictions légales, la sénatrice Les Républicains Marie Mercier, rapporteuse de l’amendement, rappelait en novembre que c’est aux sites de trouver une solution : « Je ne veux pas savoir comment ils se débrouillent, mais ils doivent trouver une solution. La loi, c’est la loi. »
Des solutions peu coûteuses
Du côté des sites pornographiques, l’option mise en avant est un recours à des tiers vérificateurs, des sociétés spécialisés dans la vérification d’identité. Ils servent d’intermédiaires entre les sites et les utilisateurs, garantissant au passage l’anonymat. Ces services s’achètent «à partir de 500 euros», comme l’indiquait Grégory Dorcel, directeur général du groupe Dorcel à l’AFP.
Les réticences des plateformes face à la régulation proviennent de leur modèle économique. La plupart des recettes qu’ils perçoivent viennent de la publicité. En bloquant l’entrée de certains publics, ou en décourageant d’autres, leurs revenus risquent de s’effondrer. Il reste cependant difficile de jauger de l’impact de telles mesures, les acteurs restants très discrets sur leurs audiences et les sommes engrangées.