Le mariage des enfants est une problématique d’actualité en Afrique notamment dans la zone du Sahel où le phénomène est fréquent et largement répandu.
Le droit de la jeune fille à décider d’atteindre l’âge adulte avant de se marier et surtout avec son consentement est inaliénable. Malheureusement le respect de ce droit n’est pas encore rentré dans les mœurs. A cet effet, il s’avère nécessaire de recourir aux normes sociales et religieuses comme moyens inéluctables permettant d’assurer la pleine réalisation et la jouissance de ce droit. La santé et le bien-être de la jeune fille sont en jeu, et aucune action n’est superflue lorsqu’il s’agit de les préserver.
Fort heureusement, certaines communautés bénéficient des interventions des organisations de défense du droit de la femme à l’instar de WiLDAF-AO qui intervient sur le sujet à travers des actions aux résultats probants. Grâce à ses activités dans certains pays du Sahel (Mali, le Niger) et le Togo, le phénomène du mariage des enfants prend de plus en plus du recul. Pour preuve, des témoignages sont davantage rendus par les bénéficiaires ; ce qui jadis était chose rare. Ces témoignages proviennent de plus en plus des jeunes filles exfiltrées du système parfois grâce à la vigilance de certains membres de la communauté, et d’autres fois, grâce au courage légendaire des jeunes filles elles-mêmes, dont les capacités ont été renforcées en vue de lutter efficacement contre le phénomène.
Les victimes en parlent…
« J’ai été victime de mariage précoce quand j’avais 13 ans. Mon acte de naissance a été falsifié. Aujourd’hui, j’ai 20 ans et j’ai divorcé il y a 7 ans. Un jour, des jeunes ont mené une activité de sensibilisation dans mon quartier. J’étais parmi les participants. Après leur animation, j’ai compris que j’ai été une victime du mariage des enfants », a confié une jeune fille malienne. Elle a pris la décision de parler de son cas. Grâce à l’intervention de l’ONG AMSOPT, elle a été libérée de ce préjudice. Aujourd’hui, elle est, elle-même, engagée comme animatrice en langue maure sur le sujet.
Dans une communauté au Mali, une jeune fille qui a fui la maison de ses parents qui voulaient la donner en mariage est revenue parce que craignant le chagrin et le tort que son absence ferait subir à sa mère. « Je suis revenue et on a célébré le mariage. Depuis que je suis allée chez lui, c’est toujours des querelles. Il a refusé que je continue mes études. Il me battait. Je ne voulais pas que la nuit tombe, tellement j’avais peur de lui. Un jour, j’ai fui pour aller chez mes parents et j’ai refusé d’y retourner. » Le monsieur s’est rendu au tribunal pour porter plainte. Le juge a fustigé cet acte, car au Mali, le mariage des enfants est interdit par la loi. Le monsieur a ensuite demandé qu’on lui restitue sa dot ; chose que le juge a balayé du revers de la main, avec une mise en garde contre toute représailles à l’endroit de la famille de la jeune fille.
A l’image de ces deux jeunes filles, nombreuses sont celles en attente d’une lueur d’espoir, comme toute échappatoire, d’une vie précocement entamée et injustement imposée, souvent, avec la complicité de la famille proche. Cette lueur apparaît parfois sous la forme de l’action de volontaires qui n’hésitent pas à se mettre à dos toute leur communauté, de peu que les efforts suffisent à extirper une pauvre jeune fille de sa situation de terreur.
« A 18 ans, on n’est pas prêt pour devenir époux ou maman. A 18 ans, on doit être à l’école. On doit préparer son avenir. Les parents doivent contribuer à bâtir les citoyens du lendemain » , Mme Mme Kafui Kuwonu, chargée de programme en chef du WiLDAF-AO.
Quand les acteurs de la communauté s’engagent
Les croyances religieuses, notamment dans les pays à dominance musulmane, contribuent énormément à l’expansion du phénomène du mariage d’enfants car, selon elles, le prophète Mahomet s’est marié à une jeune fille de 9 ans. Les actions du WiLDAF ont opéré un changement de mentalité chez des imams, premiers responsables des communautés musulmanes. « Le mariage des enfants empêche la fille de s’épanouir. J’ai été touché par les activités de sensibilisation. Lors des débats sur la thématique, l’exemple est pris sur le prophète Mahomet qui s’est marié à une de ses épouses à l’âge de 9 ans. Les gens oublient que les filles de 9 ans de l’époque équivalent à des filles de 20 ans d’aujourd’hui. J’anime des émissions radio sur le thème du mariage des enfants. Je profite des Touba (prière de vendredi) pour en parler», a confié un imam.
Face à l’ampleur du phénomène, certaines communes ont inséré la thématique du mariage précoce des enfants dans leur plan d’action pour renforcer sa prise en compte dans l’enseignement primaire. C’est l’exemple de Mme Bah Marieta Dia, une élue communale qui, suite à des activités de sensibilisation, a pris l’engagement d’intégrer le thème relatif au mariage précoce des enfants dans le plan d’action de sa commune.
Comme on le voit, c’est une lutte qui paraît parfois ardue, au vu de l’ancrage de certaines mentalités aux traditions ancestrales ainsi qu’aux croyances religieuses et coutumière. WILDAF-Afrique de l’Ouest et ses partenaires, tels des colibris font leur part dans cette noble lutte ; une part énorme mais encore minime, face aux enjeux énormes et à la lourde tâche et moyens qu’incombe cette lutte.