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M. Albert Tchamdja : « Les jeunes sont trop pressés. Quand ils créent leur entreprise et trouvent un million, ils veulent s’acheter une belle voiture…et offrir des dîners à des amies.»

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M_Tchamdja
M_Tchamdja, Photo: Republicoftogo

M. Albert Tchamdja est consultant international (ISO 22000/HACCP et ISO 9001/OHSAS) et expert international en fortification alimentaire. Après 14 années de carrière dans la société FAN MILK Togo S.A., il décide en 2009 de se mettre à son propre compte par la création de Quality Service International (QSI) SARL une société œuvrant dans l’agrobusiness et pionnière en enrichissement alimentaire au Togo dont il est le Directeur Général.

Quatre années après la création de son entreprise, il réalise le doublet : Prix du meilleur projet d’entreprise de l’année 2013 de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Togo (CCIT) et Prix WIN Entreprise de l’Agence Nationale de Promotion et de Garantie de Financement des PME/PMI (ANPGF).

Dans cette interview, il revient sur le pourquoi de cette initiative, et donne son point de vue sur les causes de l’échec prématuré des entreprises des jeunes.

L-FRII : M. le Directeur Général, toutes nos félicitations pour votre doublet. Pourriez-vous nous expliquer les activités de QSI Sarl TOGO ?

M. Albert Tchamdja : «  QSI Sarl TOGO est une société œuvrant dans l’agrobusiness pour la valorisation des produits agricoles locaux par la transformation de ces produits avec les innovations majeures qui sont l’enrichissement alimentaire en micronutriments et la lutte contre les aflatoxines. Nous produisons, des farines à base de céréales et tubercules, du sucre, du riz enrichis de micronutriments ensuite ensachés et vendus à de grandes organisations humanitaires ou dans les supermarchés et centres commerciaux. »

L-FRII : Quelles valeurs ajoutées QSI Sarl apporte-t-elle à la population?

M. Albert Tchamdja : « Elles sont nombreuses sur toute la chaine de valeur de l’agrobusiness.

Nous sommes dans une zone tropicale chaude humide, où abondent les moisissures de l’espèce Aspergillus flavilus. Ces champignons secrètent des aflatoxines qui contaminent nos productions céréalières et tuent insidieusement en causant à terme le cancer du foie, l’exacerbation des carences et l’amoindrissement de nos défenses immunitaires. Nous sommes la seule société à introduire avec l’accord du ministère de l’Agriculture, les produits pour lutter contre ces toxines. L’Afrique perd énormément sur le plan de la concurrence internationale quand nous devons exporter nos produits et aussi sur le plan de la santé publique.

Nous augmentons le revenu des petits producteurs chez qui nous achetons les produits. Nous créons des emplois ruraux et non-ruraux par le stockage, la transformation, l’enrichissement et la distribution de nos produits finis directement consommables.

Nous apportons des aliments de qualité pour les questions de santé publique. »

L-FRII : Pourriez-vous plus nous expliquez cet aspect de santé publique ?

M. Albert Tchamdja : « Notre société est à l’avant-garde de la lutte contre les maladies et malformations dues à des carences alimentaires. Prenons juste quelques exemples.

Les carences en iode et fer chez l’enfant réduisent sa capacité intellectuelle de 10 points et causent l’anémie. Comment pourrions-nous garantir à nos enfants une éducation primaire s’ils sont déjà en retard par rapport à la moyenne ? Chez la mère, la carence en fer est source d’anémie, une des premières causes de mortalité maternelle.

La carence en vitamines A est source de cécité et de diminution de l’immunité. Comment travaillerons-nous si nous sommes aveugles ou constamment malades ?

Comment peut-on traiter efficacement les personnes atteintes de VIH/SIDA et de tuberculose si nous savons que lors de ces maladies les carences en nutriments s’installent ?

Seul un apport nutritionnel riche en nutriments et vitamines peut aider à résoudre ces problèmes. Et c’est à ces niveaux que nous intervenons.

Comment pourrait-on garantir à nos populations une alimentation sûre s’ils sont exposés aux effets de l’aflatoxine ? »

L-FRII : Monter une telle société qui couvre toute la chaine de l’agrobusiness et avec les exigences de qualité ne devrait pas être facile sur le plan financier. Comment vous êtes vous pris ?

M. Albert Tchamdja : « A nos débuts, j’ai frappé à beaucoup de portes d’institutions étatiques, bancaires et de micro finances, mais elles étaient toutes fermées malgré tout ce qu’on avait de novateur. Je me suis lancé sur fonds propres puisque j’ai fait une carrière de cadre pendant 14 ans à FAN MILK TOGO S.A. Aussi, nos clients ont été d’une grande aide parce qu’ils nous ont permis de pouvoir tenir avant que les choses ne s’arrangent. Je les remercie beaucoup.

Je pense qu’on fait trop la promotion de l’entrepreneuriat juste en surface sans aller aux confins des problèmes des acteurs. C’est-à-dire le financement. Je plains les jeunes qui sortent de l’université bardés de diplômes avec des idées novatrices mais fautes de moyens, laissent tomber leurs initiatives. »

L-FRII : A part le problème de financement, nous remarquons que les jeunes peinent à pouvoir faire perdurer leurs entreprises dans le temps. A quoi cela serait dû au vu de votre expérience ?

M. Albert Tchamdja : « Les jeunes sont trop pressés. Quand ils créent leur entreprise et trouvent un million, ils veulent s’acheter une belle voiture, un ordinateur, un bureau avoir une secrétaire et offrir des dîners à des amies.

L’investissement, c’est le retardement de l’étape de jouissance dans la perspective d’en avoir plus grand plus tard. Les jeunes veulent la richesse ici et maintenant. Il y a un temps pour travailler, pour galérer et un temps pour avoir de la reconnaissance et la jouissance. Si vous ne voulez pas suivre la logique des choses, les entreprises ne peuvent pas perdurer.

Tout le monde n’est pas obligé de créer une entreprise. Entreprendre est une question d’appel et un don de soi. Le vrai entrepreneur pense au succès de l’entreprise pour le bonheur des autres qui travaillent pour lui, pas se servir en premier pour faire du bamboula.    

Sur le plan de l’insuffisance de l’adéquation formation/emploi, ce n’est pas très important, car on peut s’entourer de meilleurs collaborateurs ou même se former périodiquement par des formations professionnelles continues et de remise à niveau. »

L-FRII :M. le Directeur, vous avez réalisé le doublet Prix du meilleur projet d’entreprise de l’année 2013 de la CCIT – Prix WIN Entreprise de l’ANPGF en 2013. Quels impacts ces distinctions ont-elles apporté à QSI Sarl?

M. Albert Tchamdja : « Je remercie les organisateurs pour ces initiatives. L’avantage est qu’ils nous apportent beaucoup plus de notoriété vis-à-vis des partenaires. Il apporte une valeur ajoutée à notre image de marque et cela permet aux clients de nous faire plus confiance et ainsi conquérir de nouveaux marchés.»

L-FRII : Votre message de fin

M. Albert Tchamdja : « Nous nous sommes faits nôtre cette assertion d’Hippocrate qui dit : ‘Que ta nourriture soit ton médicament et ton médicament soit ta nourriture’. Je remercie les autorités qui ont compris cela en adhérant aux recommandations de l’OMS et de la FAO sur ces questions. J’invite la population à opter pour ces aliments pour leur bien-être, car c’est de cela, il s’agit.

Inviter les institutions financières à prêter le flanc aux entrepreneurs parce que sans leurs soutiens, nous serons limités dans nos perspectives de développement.

Les jeunes entrepreneurs doivent avoir des objectifs précis dans la vie pour créer des entreprises viables.

Je vous remercie. »