Madagascar : le président désavoué par la Haute Cour constitutionnelle ; elle donne raison à l’armée

Madagascar cour constitutionnelle Andry Rajoelina

Crédits photo : Créateur : SartPik

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La Haute Cour constitutionnelle de Madagascar a tranché ce mardi 14 octobre 2025 en faveur de l’armée et au détriment du président Andry Rajoelina.

Et pour cause, quelques instants après l’annonce des militaires du CAPSAT, la juridiction a rendu sa décision. Elle constate « la vacance des postes de Président de la République et Président du Sénat » et « l’impossibilité pour le Gouvernement en place de remplir les fonctions de Président de la République ». Le texte désigne ensuite le colonel Michaël Randrianirina comme chef de l’État par intérim.

Cette validation juridique intervient après un vote parlementaire sans précédent. Cent trente députés sur cent soixante-trois ont adopté la motion de destitution contre Andry Rajoelina, soit largement plus que les deux tiers requis. Le chef de l’État avait pourtant dissous l’Assemblée nationale quelques heures plus tôt, dans une dernière manœuvre désespérée.

Depuis le palais présidentiel d’Ambohitsorohitra, le colonel Randrianirina a annoncé la dissolution du Sénat et de la Haute Cour constitutionnelle. Paradoxe : c’est cette même juridiction qui vient de légitimer sa prise de fonction. « On va prendre le pouvoir à partir d’aujourd’hui », a-t-il déclaré devant les caméras. L’Assemblée nationale, elle, continue de siéger.

Andry Rajoelina dénonce depuis un lieu tenu secret une « tentative de coup d’État ». Son communiqué parle d’une « faction de rebelles militaires » entrée « par la force » au palais. « Le président demeure pleinement en fonction », assure la présidence. Mais personne ne sait vraiment où se trouve l’homme qui avait lui-même accédé au pouvoir par un putsch en 2009. La radio française RFI affirme qu’il aurait été exfiltré dimanche par un avion militaire français.

Dans les rues d’Antananarivo, la foule célèbre. Place du 13-Mai, des milliers de manifestants brandissent des drapeaux malgaches. Concerts improvisés, applaudissements. Les soldats du CAPSAT ont été accueillis en héros à leur retour au camp de Soanierana. « Merci CAPSAT ! », scandait la foule.

Bref, Madagascar retrouve un scénario familier. L’île connaît sa énième transition militaire. Un comité d’officiers de l’armée, de la gendarmerie et de la police nationale va assurer les fonctions présidentielles. Un gouvernement civil suivra « après quelques jours », promet le colonel Randrianirina.

Les manifestations ont débuté le 25 septembre dernier. La génération Z réclamait d’abord la fin des pénuries d’eau et d’électricité. Le mouvement a grossi : les syndicats de fonctionnaires se sont joints aux grèves. Puis le CAPSAT a basculé samedi dernier, changeant le rapport de force. Les autres unités militaires ont suivi.

Le bilan reste lourd. Les Nations unies comptabilisent au moins vingt-deux morts et plus d’une centaine de blessés depuis le début de la contestation. La gendarmerie, longtemps fer de lance de la répression, a finalement rallié le camp des insurgés.

La Constitution est suspendue jusqu’à nouvel ordre. Andry Rajoelina affirme mener « plusieurs visites officielles » auprès de pays membres de la SADC, l’organisation régionale d’Afrique australe. Mais personne ne confirme son itinéraire. L’ONU observe la situation. « On s’opposera » à un coup d’État, a prévenu le porte-parole du secrétaire général.

Pour Jouannah Rasoarimanana, 24 ans, comptable à Antananarivo, c’est une victoire. « Je suis vraiment très heureuse, en tant que jeune, ici, à Madagascar, on est libre maintenant », confie-t-elle. Enfin, c’est ce qu’elle espère. L’histoire malgache regorge de promesses brisées.

Plus de 80 % des 32 millions d’habitants vivent avec moins de 2,80 euros par jour. Ce chiffre correspond au seuil de pauvreté fixé par la Banque mondiale. Les manifestants réclament autre chose que des changements de têtes : ils veulent de l’eau, de l’électricité, un avenir.

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