L’organisation de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch, dénonce un « massacre » de l’armée malienne dans un rapport glaçant.
Moura, un village du centre du pays, a fait l’objet entre le 23 et le 31 mars d’une vaste opération militaire. L’armée malienne a indiqué avoir tué 203 jihadistes et en avoir interpellé une cinquantaine. Mais de nombreuses sources locales et humanitaires, dénoncent auprès de RFI des exécutions massives de personnes. « J’ai vécu dans la terreur chaque minute, chaque seconde, en pensant que mon tour viendrait d’être attrapé et exécuté. »
C’est l’un des témoignages recueillis par l’ONG auprès de 27 habitants de Moura, commerçants qui s’y trouvaient pour le marché. Les témoins affirment que parmi les personnes tuées, certains étaient effectivement des jihadistes, mais pour la majorité il s’agissait de civils. D’autres survivants mentionnent clairement un ciblage ethnique des Peuls de la part des combattants maliens et russes.
« Ils ont été tués parce qu’ils portaient la barbe et un pantalon court », précise un rescapé, qui rappelle que les habitants y étaient obligés.
En effet depuis plusieurs années, le village de Moura subit l’asservissement des terroristes de la Katiba Macina. Le groupe appartient au GSIM, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans lié à Aqmi, qui vient régulièrement dans le village prélever l’aumône, prêcher et s’approvisionner.
En outre, les Russes auraient même été plus nombreux que les Maliens lors de l’opération militaire. Les témoignages recueillis dévoilent une effroyable mécanique : des tirs par hélicoptère un jour de marché, puis pendant près d’une semaine, les habitants du village sont arrêtés, interrogés, retenus en plein soleil pendant plusieurs jours, et même parfois exécutés immédiatement.
« Le bruit des balles a retenti dans le village de lundi à jeudi », témoigne un habitant. Des survivants affirment avoir été contraints de creuser des fosses et d’y enfouir les cadavres, qui avaient pour beaucoup été brûlés. Human Rights Watch réclame une enquête indépendante.
Les autorités maliennes n’ont pas réagi. Le mois dernier, après des révélations sur d’autres exactions de l’armée malienne et de leurs supplétifs russes, les autorités de transition avaient formellement nié et accusé Human Rights Watch de chercher à « déstabiliser la Transition ».
Avec RFI