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Quels intérêts a-t-on à se marier en séparation de biens ? Les conseils

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On s’aime, on se marie ? Pas si simple. Ceux qui passent devant le maire, sans se rendre, au préalable, chez leur notaire pour établir un contrat de mariage, scellent aussi leur union patrimoniale, et n’en ont pas forcément mesuré les conséquences.

L’union financière n’est pas toujours du goût de ceux qui avaient l’habitude de gérer leur argent en toute indépendance. C’est, probablement, ce qui pousse de plus en plus de couples à choisir le régime matrimonial de la séparation de biens.

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Ce régime garde aussi les faveurs des travailleurs indépendants, qui veulent protéger leur famille de leurs créanciers, ou de ceux qui souhaitent parer à l’éventualité d’un divorce. Pour vous assurer la protection la plus efficace, voici, en 8 points, nos conseils pour profiter au mieux de ce régime.

1-Gérer ses biens personnels comme avant le mariage

Le régime de la séparation de biens permet d’atteindre cet objectif, puisque, grâce à lui, chacun conserve son patrimoine : non seulement les biens possédés par chacun avant le mariage restent personnels mais il en va de même pour ceux acquis, créés ou reçus après l’union. Mais comment prouver, de façon certaine, que la résidence secondaire familiale et le secrétaire Empire qui trône au milieu du salon vous appartiennent en propre ? Pour les biens immobiliers, pas de souci : la preuve de la possession est apportée par le titre de propriété (un acte notarié), dans lequel est précisée la répartition des droits de chacun des époux. Pour les biens meubles (comptes bancaires, voitures, meubles…), la vigilance s’impose car « possession vaut titre ».

Aussi ces biens seront-ils présumés appartenir par moitié à chaque époux… sauf en cas de preuve contraire (facture à votre nom, inventaire de succession, carte grise du véhicule…). Pour écarter toute ambiguïté, mieux vaut donc dresser l’inventaire des biens meubles (sans passer forcément par un notaire) que chacun possède au jour du mariage. « Le plus simple est de dresser un inventaire, en deux exemplaires, signés chacun par les deux époux, assure maître Stéphane Vieille, notaire à Bourg-en-Bresse. Ce document peut ensuite être réactualisé par des avenants numérotés et signés, lors des dons et héritages reçus ou des achats faits pour le compte personnel de l’un ou l’autre époux.»

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2-Partager ses dépenses courantes et gérer ses revenus personnels librement

Les couples séparés de biens conservent une grande autonomie financière, la gestion de leurs revenus propres ne regardant qu’eux, dès lors qu’ils ont contribué aux charges du mariage. Cette contribution est, en principe, proportionnelle aux facultés de chacun (art. 214 du code civil). En pratique, il faut vous entendre sur ce que chacun paie. Attention toutefois : préciser, dans une clause de votre contrat de mariage, une clé de répartition de vos contributions à ces charges (l’un se chargeant, par exemple, du paiement des factures d’eau, de gaz et de téléphone, l’autre des frais d’alimentation et de transport, etc.) est une fausse bonne idée. Une telle clause vous simplifie, certes, le quotidien en vous dispensant de tenir des comptes entre vous. Mais elle a de lourdes conséquences puisqu’elle peut faire présumer que vous avez chacun contribué aux charges du mariage, même si l’un d’entre vous n’a, dans les faits, rien payé. Attention également : si, dans le contrat de mariage, l’un des époux s’engage à financer intégralement le logement familial (emprunt et travaux) au titre des charges du mariage, il ne pourra réclamer aucune créance à son conjoint en cas de divorce (cass. civ. 1° du 15.5.13 n° 11-26933). «Une grande prudence s’impose avec la rédaction d’une telle clause, dont les conséquences doivent être bien comprises par les époux. Par ailleurs, si une clause de ce type est insérée dans le contrat de mariage, il faudra le modifier pour pouvoir changer la répartition de la contribution aux charges du mariage, ce qui manque de souplesse », alerte maître Laurence Ligas-Raymond, avocate à la cour de Grenoble. Maître Stéphane Vieille préconise donc de prévoir simplement dans le contrat de mariage que « chacun contribuera aux charges du mariage en fonction de ses facultés ».

3-Acquérir à deux sa résidence principale

Attention : le régime de séparation de biens n’est, a priori, pas adapté à ce projet. « C’est en matière d’achat immobilier que la plus grande prudence s’impose pour les époux séparés de biens», alerte maître Stéphane Vieille. Même si vous avez participé au financement d’une propriété acquise par votre conjoint, celui-ci en reste le seul propriétaire. Il en va de même si vous avez financé la construction d’une maison sur un terrain lui appartenant (cass. civ. 1°, 15.5.08, n° 06-16.939). «Pour vous protéger, il est judicieux de formaliser votre contribution dans un acte distinct du contrat de mariage», préconise maître Vieille. Vous pouvez, par exemple, faire signer une reconnaissance de dette à votre conjoint ou lui consentir une donation déclarée au fisc. Si vous n’avez rien formalisé, vous prenez le risque que les juges considèrent votre participation financière comme une simple contribution aux charges du mariage, si bien que vous ne récupérerez rien en cas de divorce.

4-Protéger ses biens des créanciers professionnels

Le régime de séparation met effectivement les biens du conjoint d’un époux exerçant une activité indépendante à l’abri de ses créanciers professionnels. À condition, toutefois, qu’il ne se soit pas porté caution personnelle. «Les créanciers veulent des garanties. Cela les incite à solliciter un engagement solidaire des époux, engagement qui annule tous les effets protecteurs du régime de séparation de biens», prévient maître Ligas-Raymond. Ce régime présente aussi l’intérêt de protéger le conjoint entrepreneur en cas de divorce. Alors que dans un régime communautaire, la valeur de l’entreprise serait à partager.

5-Simplifier un éventuel divorce

Le régime de séparation de biens facilite la situation en cas de divorce: chacun des époux repart avec son patrimoine. Il n’y aura donc aucun problème… si vous avez géré chacun vos biens séparément sans payer des dépenses personnelles de l’autre. «Si vous n’êtes pas capable d’apporter la preuve du caractère personnel d’un bien, celui-ci est présumé indivis, explique maître Laurence Ligas-Raymond, il faudra alors procéder au partage de l’indivision. Il faut savoir que, même si un époux a financé l’acquisition du bien indivis dans une proportion différente de celle de ses droits sur le bien, le titre de propriété l’emporte toujours sur la participation financière. Ce sont donc les droits de l’époux sur le bien fixés dans l’acte d’acquisition qui prévalent.» Il reste possible d’apporter la preuve contraire, sauf si une clause de contribution aux charges du mariage dans le contrat de mariage l’exclut.

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6-Éviter le versement d’une prestation compensatoire en cas de divorce

Même séparé de biens, un époux qui divorce peut avoir droit à une prestation compensatoire. Statistiquement, son montant est même légèrement supérieur pour les couples séparés de biens. «La prestation compensatoire a pour objet de réparer le préjudice matériel causé par le divorce à l’un des époux, et de compenser la disparité que la rupture crée dans les conditions de vie respectives, souligne maître Ligas-Raymond. Le juge fixera aussi le montant de la prestation compensatoire pour sanctionner un ex-époux ayant profité indûment de ce régime pour accroître son patrimoine personnel ou ayant bénéficié de la collaboration bénévole de son conjoint dans le cadre de son activité professionnelle.» Concrètement, le versement d’une prestation compensatoire est prononcé lorsque le juge constate une disparité de revenus, de patrimoines et que le mariage a duré dans le temps.

7-Protéger ses enfants respectifs

«Le régime de séparation de biens est recommandé pour les couples en recomposition familiale, assure maître Stéphane Vieille, il permet de mieux identifier les patrimoines de chacun et de protéger les enfants.» A contrario, les couples mariés sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts mêlent leurs revenus et acquièrent en commun les biens achetés après leur mariage, ce qui nuit aux héritiers de celui qui décède en premier, surtout si c’est celui qui percevait les revenus les plus importants ; la moitié des biens communs échappent, en effet, définitivement aux beaux-enfants. Avec la séparation de biens, il reste possible de transmettre, si on le souhaite, tout son patrimoine à ses enfants.

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8-Protéger le conjoint survivant

Le conjoint survivant qui était marié en séparation de biens a, certes, les mêmes droits sur la succession que si les époux avaient opté pour le régime légal: en l’absence de testament ou de donation en sa faveur, il hérite du quart du patrimoine de son époux en pleine propriété ou, s’il n’y a pas d’enfants d’une précédente union, il peut opter pour la totalité en usufruit. Mais il reste moins bien protégé qu’un époux marié sous le régime de la communauté, puisque ce dernier devient automatiquement propriétaire de la moitié des biens achetés pendant le mariage. «Pour permettre au conjoint survivant ayant un patrimoine faible de continuer à vivre correctement, il faut modérer les effets du régime de séparation de biens en constituant, au bénéfice du survivant, des droits successoraux plus importants, par un testament, une donation entre époux, ou une assurance vie à son profit», conseille maître Vieille. Il est aussi possible de changer de régime matrimonial, au moment de la retraite, lorsqu’il n’est plus nécessaire de protéger son patrimoine de ses créanciers professionnels. Ou encore de créer, entre les époux, une société d’acquêts, à laquelle le couple pourra apporter, notamment, sa résidence principale. «Cet outil protège le conjoint survivant en créant une communauté ciblée sur certains biens. On peut même y adjoindre une clause de préciput au bénéfice du conjoint survivant », explique maître Vieille. Il recueillera alors les biens visés par cette clause en dehors de la succession comme s’il en était le seul propriétaire. «Il s’agit là d’un avantage matrimonial, dont l’étendue devra être limitée en présence d’enfants d’une première union. Ceux-ci bénéficiant d’un recours dénommé “ action en retranchement ” pour sauvegarder l’intégrité de leur part réservataire », précise maître Vieille.

Avec Lefigaro