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RDC : la nouvelle vie de ‘fermier’ de l’ancien président Joseph Kabila

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Joseph Kabila, l’ex-président RD Congolais est la personnalité du premier numéro de la nouvelle rubrique de Jeune Afrique ‘La vie après le pouvoir’. L’objectif est de faire la lumière sur ce que sont devenus certains présidents emblématiques une fois libérés de leurs responsabilités.

RDC : la nouvelle vie de ‘fermier’ de l’ancien président Joseph Kabila

Dans ce numéro, le focus est fait sur la nouvelle passion de l’ancien chef d’Etat : la protection de l’environnement dans  son immense domaine de Kingakati situé à 50 km à l’est de Kinshasa. Ce domaine, qu’il s’est fait construire lorsqu’il était au pouvoir, est un ensemble de huit bâtiments posés sur un plateau dominant la vallée de la rivière N’Sele, rapporte l’hebdomadaire.

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Ces dernières années, Kabila avait coutume d’y réunir ses collaborateurs pour parler stratégie. Mais depuis qu’il a quitté la présidence, en janvier, renseigne le journal, il a fait de cette immodeste demeure sa résidence principale. Le 4 mars, il y a reçu son successeur, Félix Tshisekedi. Désormais chef de la majorité parlementaire, il continue d’y réunir les responsables politiques qui lui sont restés fidèles, et ils sont nombreux: le 1er mai, ce sont les gouverneurs de province du Front commun pour le Congo (FCC) qui y ont été conviés ; le 22 juin, c’était au tour des sénateurs de cette coalition. Mais rares sont ceux qui ont pu pénétrer dans ses appartements privés.

Son domicile n’occupe qu’une petite partie d’un domaine bien plus vaste, apprend-on. Le parc de la vallée de la N’Sele, ce sont 10 000 ha de nature verdoyante, coupés du tumulte de la capitale et délimités par une clôture longue de 32 km. On y trouve antilopes et zèbres, gnous et crocodiles, girafes et buffles, et même un python de 4 m. Une douzaine de rhinocéros paissent dans un enclos réservé. Des lions ­ blancs et bruns ­ ont également leur espace. Et depuis le 29 mai donc, on peut aussi y croiser une harde d’éléphants.

Girafes, rhinocéros et éléphants

RDC : la nouvelle vie de ‘fermier’ de l’ancien président Joseph Kabila
Des animaux du domaine de Kabila

Dans cette arche de Noé privée, seuls manquent les deux emblèmes de la RD Congo : le léopard, trop difficile à garder en captivité, et l’okapi, endémique en RD Congo et protégé par une organisation américaine, l’Okapi Conservation Project, que le parc n’a pas encore réussi à obtenir.

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RDC : la nouvelle vie de ‘fermier’ de l’ancien président Joseph KabilaIl n’empêche. Depuis son ouverture au public, en juin 2018, autrement dit six mois avant que Kabila ne quitte la présidence, ce lieu est devenu une attraction haut de gamme à Kinshasa. Chaque week-end, quelque 1 700 visiteurs se pressent dans cet îlot de fraîcheur pour des « safaris » sur des camions surmontés de gradins, facturés 50 000 francs congolais (27 euros).

Découverte du Paradis

Ce jardin d’Éden, Kabila l’a découvert il y a près de vingt ans, alors qu’il venait d’être propulsé à la tête du pays après l’assassinat de son père, Laurent-Désiré. Alors âgé de 29 ans, le jeune homme, qui avait grandi entre le maquis de la rébellion paternelle, dans le Sud-Kivu, et la Tanzanie, où l’on trouvait déjà certaines des plus belles réserves de faune sauvage du continent, ne se sentait pas très à son aise à Kinshasa, anarchique capitale de plus de 10 millions d’habitants. Jusqu’à ce qu’il tombe sur cette vallée où serpente une paisible rivière.

Rapidement, il installe quelques préfabriqués sur l’une des rives. « C’est dans ces bâtiments, déjà, que nous avions préparé les négociations pour les accords de Sun City, en 2002 », se souvient Barnabé Kikaya bin Karubi, un intime de Kabila depuis l’arrivée de ce dernier au pouvoir. À cet endroit où la N’Sele dessine un « S », les baraquements ont été remplacés par un restaurant avec piscine. Kabila s’y promène encore régulièrement et pose parfois pour des selfies avec les visiteurs.

Afin d’en faire son royaume, il a dû négocier avec la chefferie bateke. « Il a construit des écoles, des routes et des dispensaires », énumère Kikaya bin Karubi. Mais l’acquisition formelle de cet immense terrain (19 000 ha au total, dont la moitié seulement est consacrée à la réserve de la N’Sele) reste nimbée de mystère. C’est l’une des rares propriétés de Kabila dont la trace n’a pas été retrouvée lors de l’exhaustive enquête menée par Bloomberg et le Groupe d’étude sur le Congo sur le patrimoine du chef de l’État, en 2017.

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Aménagement

Au fil des ans, d’impressionnants investissements ont permis d’aménager l’endroit. D’impeccables routes asphaltées ont vu le jour, 100 000 arbres ont été plantés, et la construction de digues a permis de créer plusieurs lacs artificiels. Au total, entre 300 et 400 ouvriers s’activent chaque jour sur la propriété.

Une station de pompage et de purification a été édifiée pour alimenter la résidence de l’ancien président en eau potable. Joseph Kabila s’est même lancé dans l’élevage : il possède 1 300 porcs et 400 boeufs, dont les déjections alimentent en gaz un générateur électrique. Sur ce domaine qui peut presque fonctionner en autarcie, un canal de dérivation de la rivière a récemment été mis en chantier : il doit générer à terme 2 MW d’électricité au bénéfice exclusif du parc, qui accueillera bientôt quinze lodges pour les touristes.

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RDC : la nouvelle vie de ‘fermier’ de l’ancien président Joseph KabilaL’ancien chef de l’État a même fait installer les carlingues de trois avions (un Lockheed Tristar, qui reliait jadis Kinshasa à Bruxelles, un Boeing 727 et un Boeing 707). Visibles sur Google Maps et par les passagers des appareils à l’approche de l’aéroport de Ndjili, ils ont alimenté bien des fantasmes.

Certains y ont vu la preuve que l’ancien président préparait, depuis sa résidence privée, une action militaire clandestine. Aucun doute n’est toutefois permis : les appareils sont figés en haut d’une colline, hors d’usage, sans moteur ni piste de décollage à proximité. Kabila souhaite en fait les repeindre dans sa couleur préférée ­ le bleu ­ et faire du site un nouveau restaurant avec vue.