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Stress, dépression, addictions : dur d’être un chômeur

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La santé des chômeurs est plus mauvaise que celle des salariés. Un sujet encore tabou en France selon une étude publiée tout récemment.

Image d’illustration

Stress, perte de sommeil, problèmes cardio-vasculaires, addictions, diabète, dépression… Perdre son travail et avoir du mal à en retrouver nuit gravement à la santé.

Pourtant, le sujet de la santé des chômeurs est “sous-estimé collectivement” et continue de faire l’objet de très peu d’études scientifiques, affirme l’association Solidarités nouvelles face au chômage (SNC) dans un rapport publié le jeudi 20 septembre.

“Politiquement, c’est sensible”

Vertigineux, le chiffre de 10.000 à 14.000 décès imputables au chômage qu’avance le nouveau rapport est issu d’une étude de 2015 réalisée par Pierre Meneton, chercheur à l’INSERM. “Vous avez trois fois plus de risques de décéder si vous êtes chômeur”, rappelle-t-il. Quand son étude est sortie, il a vu débarquer une mission de l’Inspection générale des Affaires sociales (IGAS) pour plancher sur le sujet.

Trois ans plus tard, il n’a toujours pas vu la couleur du rapport. “Politiquement, c’est sensible”, décrypte-t-il. “En dehors du drame humain que cela représente, c’est aussi un problème de santé publique”. Et ce, sur fond de chômage qui ne baisse pas et d’assouplissement du Code du Travail. Au deuxième trimestre 2018, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi, avec ou sans activité, s’est établi à un record de 5,94 millions, en France.

Isolement et dévalorisation

Le rapport pointe aussi une multiplication des contrats à durée déterminée (CDD), et pour des périodes de plus en plus courtes. “Cela a pour conséquence de maintenir les salariés concernés dans une situation faite d’alternance d’emploi et de chômage qui tend à les enfermer durablement dans la précarité”, souligne l’étude. Les individus en situation d’emploi précaire ou de chômage sont deux fois plus nombreux que les salariés ayant un emploi stable à estimer que leur état de santé n’est pas satisfaisant.

“Au moment du chômage, les fragilités remontent à la surface avec l’isolement et le sentiment de dévalorisation”, explique Madeleine Cord, membre du réseau de psychologues de l’association SNC. “L’une des incidences les plus importantes, ce sont les addictions”, souligne-t-elle. Elle plaide pour que la souffrance psychique liée au chômage soit introduite dans la formation des professionnels de santé et des personnels de Pôle Emploi.

Cercle vicieux

De leur côté, les chômeurs renoncent davantage aux soins que les autres, en partie pour des raisons financières. Double peine pour les demandeurs d’emploi, donc, voire un cercle vicieux : “Un chômeur en mauvaise santé a plus de difficultés à retrouver du travail qu’un chômeur en bonne santé”, constate Michel Debout, auteur du livre “le Traumatisme du chômage”.

Face à ces constats, l’étude livre quelques pistes pour un soutien accru des chômeurs en matière de santé.

Parmi elles, une meilleure information sur leurs droits, une couverture complémentaire plus large, et la mise en place de moyens luttant contre l’isolement. “Ne serait-ce que d’un point de vue purement économique, affirme Michel Debout, il y a tout à gagner à ce que les chômeurs soient en bonne santé !”

Même si cette étude table sur des données de la France, les répercussions du chômage sur la santé pourraient être, elles, universelles.