Certains journalistes accusent le chanteur d’origine rwandaise d’avoir violé la frontière entre information et divertissement au JT de TF1. N’y a-t-il pas d’autres sujets de désolation dans une France pré-électorale crispée ?
Ce 9 janvier, au journal télévisé de la chaîne française TF1, Paul Van Haver – vrai nom de l’artiste belge – répond à une interview sur la sortie prochaine de son album Multitude, neuf ans après le phénomène Racine carrée. À la dernière question de la présentatrice, le chanteur cravaté, sobrement vêtu de noir, répond en musique, propulsant, par surprise, un second single, après le titre Santé dont le clip officiel a déjà été visionné plus de 25 millions de fois depuis octobre.
Après avoir évoqué, dans l’interview « parlée », les doux souvenirs de séjours africains en mode « sac à dos » il chante, dans les paroles d’Enfer, son burn-out qui avait conduit, en 2015, à son rapatriement d’urgence de la RDC. Le JT s’achève sur la prestation. Persistance rétinienne. Bouche-à-oreille instantané… Vanity fair évoque rien de moins qu’une « France bouche bée » après la performance. Solennité élégante. Assurance sans prétention. Fusion d’influences intergénérationnelles et interculturelles, dans une France pré-électorale crispée. Les avis époustouflés semblent unanimes : l’artiste phénomène est le seul à pouvoir se permettre aujourd’hui de tels coups d’éclat. Un coup d’éclat qui, aux yeux de grognons, apparaît comme un coup d’État…

Comme un buzz vaut bien un contre-buzz, le journal français L’Obs prend la tête de la croisade contre le dispositif de présentation du nouveau titre de Stromae qu’il juge « aberrant » et « franchement embarrassant ». Au-delà de critiques artistiques convoquées en renfort, un article dénonce un brouillage de « ce qui reste de repères entre information et divertissement ». Alors que les mélomanes lambda évoquent une « gifle vivifiante », quelques journalistes dénoncent une « baffe » assénée à la « déontologie journalistique ». À les en croire, TF1 aurait enfoncé l’ultime clou dans le cercueil d’une presse souvent qualifiée de « Médias pourris ! Médias complices ! »
Certes, dans un exercice moins teinté de journalisme que de promotion, la présentatrice de cette chaîne privée, Anne-Claire Coudray, avait des airs de groupie, sans doute par l’odeur du coup médiatique alléchée. Mais des vocalises – davantage spontanées, il est vrai – ont déjà résonné dans des JT. Les tympans meurtris de preneurs de son se souviennent notamment de Patrick Fiori…
Avec JeuneAfrique