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Togo : « Un jeune chef d’entreprise est comme une pute », dixit Gerry Taama

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Gerry Taama, homme politique et député à l’Assemblé nationale, est un sacré personnage. Ce chef d’entreprise, diplômé en sociologie et droit international humanitaire, est connu pour sa verve sur les réseaux sociaux. Il n’en démord pas, à chacune de ses publications.

Cette semaine, Gerry Taama a partagé avec les internautes une expérience vécue, qu’il a espièglement titrée “ Un jeune chef d’entreprise est comme une pute, il prend tous les marchés. “

L’intégralité de la publication

En 2011, je venais de livrer le rapport d’un sondage effectué au profit d’une grande banque de la place, quand le directeur financier de cette institution me demanda.
– monsieur Taama, pouvez-vous nous faire une enquête mystère, rien que pour notre siège social dans un premier temps ?
– oui, sans aucun problème.
– ça va prendre combien de temps et nous coûter combien ?
– donnez-moi les tdr et je vous réponds dans les meilleurs délais, répondis-je, en espérant que mon vis-à-vis ne découvrirait pas ma confusion.
– ok, vous aurez les tdr dans trois jours. Je compte sur vous pour que ça aille vite.
La vérité est que c’était la première fois que j’entendais l’expression “enquête mystère”. Enquête, je connais, mystère, je connais, mais enquête mystère ? C’est encore quelle sorcellerie ça ?
De retour à la maison, je me suis rué sur mon ordinateur et je me suis enfermé pendant 3 jours sur internet. J’ai parcouru des centaines de sites, visionné des vidéos, téléchargé des pdf, en français comme en anglais, j’ai même acheté un livre sur amazone Kindle.
Au bout de deux jours, j’étais devenu un spécialiste des enquêtes mystère.
J’ai même anticipé sur les tdr (que la banque a actualisé) fais ma facture et déposé le tout.
J’ai gagné le marché et rendu le rapport quelques mois plus tard. Trois semaines après, le même directeur m’a appelé.
– monsieur Taama, nous sommes très satisfaits de votre rapport, dont nous avons d’ailleurs commencé à appliquer les recommandations. Par contre, je ne sais pas si c’est parce que vous êtes Togolais, le coût de vos prestations est très abordable. Voyez vous ce document, dit-il en me montrant un epais fascicule sur son bureau, c’est le rapport sur la même enquête demandé à une agence ivoirienne. De vous à moi, personne n’a rien compris de leurs recommandations et pourtant, nous leur avons payé plus de 100 millions. (Moi comme un con, javais demandé 5 millions et obtenu 4,5.)
– mais grand frère, vous auriez pu m’avertir
– ah non, je représente la banque. Je ne vais pas demander à un prestataire d’augmenter sa facture. Par contre je suis content car j’ai insisté qu’on vous prenne et vous avez fait un excellent boulot.
Je vous raconte cette histoire parce qu’elle résume à elle seule le pari de l’entrepreneuriat dans nos pays. Quand on commence son affaire, on ne peut pas se donner le luxe de se spécialiser, car le marché est encore trop étroit. Les opportunités sont rares. Voilà pourquoi j’ajoute toujours “commerce général” à l’objet de toutes mes entreprises. Tout ce que tu trouves, il faut faire. On te démande si tu peux fournir un boing 747, tu réponds oui, mais que ça va prendre un peu de temps. Il faut être opportuniste et polyvalent. Et pour ce faire, on a un associé extraordinaire qui est internet. Normalement, avec internet, on n’a plus besoin d’aller à l’école, mais seulement de passer des examens. Restez là à faire koakpato et gnadoè sur whatsapp et Facebook. C’est vos parents qui vont vous chasser de leur maison. Internet, c’est une université ouverte et libre d’accès.
Mais attention, il y’a un risque à vouloir être polyvalent, c’est celui de bâcler le travail. Il faut donc soit sous-traiter (la marge est faible mais c’est toujours bon à prendre) ou avoir des capacités d’imagination, de synthèse et de créativité qui vous permettent de fournir un travail de qualité sans formation initiale. Pour moi, ces qualités sont indispensables à tout entrepreneur. .
Voilà. Quand on est jeune entrepreneur, au Togo, il faut être polyvalent. Plus tard, quand on est assis, on se spécialise. Quand j’entends un jeune entrepreneur togolais me dire: je ne fais pas ça, les bras m’en tombe. En comparaison, avez vous jamais entendu un zemberma dire qu’il n’avait pas quelque chose ? Il dit toujours que c’est au magasin, et il fait le tour de ses copains pour en trouver. Nous avons beaucoup à apprendre de ces gens là. Et pourtant, beaucoup n’ont pas mis pied à l’école.
Maintenant, ça suffit, éteint vite Facebook et ouvre une autre application qu’on appelle Google. Dans la barre de recherche, tape : offre d’emploi Togo, et tu seras surpris des résultats. Quittez les réseaux sociaux et retournez à la vraie vie, créez ou trouvez des emplois. Après, venez chercher l’argent sur ce vaste marché que constituent ces réseaux sociaux. Sinon, c’est agban, agbodji (bagages dehors). Les parents sont fatigués de vous trouver collés a leurs basques Lol.