Tom le griot de son vrai nom Tom Esso Ekona, est kabyè originaire de Landa dans la préfecture de la Kozah à19km à l’est en allant vers Kétao. Fils d’une modeste famille dont la mère est ménagère et le père griot, il a décidé de suivre les marches de son père et de prendre la relève de son métier de griot qu’il apprenait à sa suite depuis son plus jeune âge. Habitant le paisible quartier de Cacavéli, banlieue de Lomé, il a accepté à cœur joie de nous recevoir en cet après-midi ensoleillé dans ce quartier particulièrement propre ce samedi 08 novembre après la matinée de l’opération ‘Togo propre’.
Il partage avec nous son expérience dans l’exercice de la musique traditionnelle au Togo.
L-FRII : Tom le griot, comment en êtes-vous arrivé à la musique traditionnelle?
TOM LE GRIOT: ‘Dès le jeune âge j’accompagnais mon père aux funérailles, mariages etc., c’est comme cela que j’ai été initié à ce métier. Comme chaque artiste, c’est la passion qui me motive. Les gens pensent souvent que le griot se limite aux régions rurales et aux activités qui s’y passent, mais selon moi, il est celui qui rapporte l’information dont le villageois n’a pas forcément accès comme les citadins qui ont la télé, la radio, la presse etc. Le griot sert de relais de l’information de la source vers la contrée reculée.’
L-FRII : Pourquoi avoir choisi la musique traditionnelle et non un autre genre musical ?
TOM LE GRIOT: ‘Ce choix parce que nous avons souvent tendance à oublier nos traditions, c’est donc pour promouvoir nos valeurs. En pays Kabyè, il est dit qu’on reconnait quelqu’un par sa tradition ou sa danse traditionnelle. C’est simplement pour montrer la multitude des richesses culturelles que nous possédons que je me suis lancé dans la musique typiquement traditionnelle. Mon père me disait qu’il serait bon d’intégrer nos instruments modernes dans la musique traditionnelle, c’est pourquoi j’ai appris à jouer de la guitare et autres instruments, pour parfaire ce métissage entre tradition et modernisme.’
L-FRII : Vous vous êtes surnommé ‘Griot’, est-ce à dire que dans vos morceaux, vous narrez uniquement des épopées comme le font d’autres griots ?
TOM LE GRIOT: ‘Non. Cela ne s’arrête pas là car le griot se doit de sensibiliser la population, de l’informer et de l’égayer. Dans le cadre de la maladie à virus Ebola, nous avons eu à faire des sensibilisations de notre côté parce que certaines personnes dans nos zones reculées n’ont toujours pas à leur disposition la presse, la télé…Le griot sert par ses chansons, de complément valide des radios rurales pour le relais des informations dans les zones assez reculées.’
L-FRII : Pouvez- vous nous parler des instruments utilisés par le griot dans l’exercice de son art ?
TOM LE GRIOT: ‘L’instrument principal utilisé par mon père était le hochet, qui est une calebasse sur laquelle est tressée des fils de noix de palme. Il est accompagné de flûtistes, de balafons, le cor et parfois l’harmonica. J’ai intégré la guitare, les tam-tams, pour donner plus d’éclat à mes sonorités musicales quand j’ai pris la relève.
C’est le cas même dans mes collaborations artistiques comme le cor joué dans le morceau du groupe « The Seeds », la flûte et le tam-tam avec « Cécile Méba », les gongs, les flûtes avec « José Grace Béni » et bien d’autres encore.’
L-FRII : Nous savons qu’au Togo, vivre de son art et se faire accompagner par un producteur n’est pas facile. Pour vous qui êtes dans la tradition, comment avez-vous pu émerger et tenu jusqu’à ce niveau ?
TOM LE GRIOT: ‘C‘est une difficulté inhérente à l’exercice de ce métier et présentement, je n’ai pas de producteur. C’est l’amour de ce métier qui me pousse à y arriver. J’ai certes commencé avec mon papa et après son décès j’ai poursuivi et par la grâce de Dieu, je me suis fais connaitre par M. Komla, producteur de cassettes qui m’a aidé à enregistrer mes sons et sortir mon premier album. Je me réjouis quand même du fait que la culture togolaise soit en train d’être revalorisée si quand même ce n’est pas tout le monde qui apprécie la musique traditionnelle.’
L-FRII : Vous avez au moins 04 albums déjà à votre actif et gagné plusieurs prix à l’international. Quels sont vos prochains projets?
TOM LE GRIOT: ‘Dans ce cadre, j’ai créé une association le 26 Avril 2001, dénommée RITA (Richesse Terre de nos Aïeux), où j’apprends aux gens comment jouer divers instruments. J’ai ensuite créé un festival FESTAMPE (Festival Togolais de Ampé) dont la première édition a eu lieu en Avril passé aux Palais des Congrès de Kara. Mon objectif est de sortir un prochain album et d’asseoir une compagnie de promotion de la musique traditionnelle au Togo et de créer un festival de danses traditionnelles, tout en incitant le ministère de la culture à appuyer ces initiatives.’
L-FRII : Préparez-vous la relève pour ce type de musique, vu que la jeune génération est plus attirée par la danse et l’ambiance ?
TOM LE GRIOT: ‘Oui, dans l’association que j’ai créée et où j’entraine des jeunes, deux filles dont Princesse Agathe, ont déjà sorti leur premier album de musique traditionnelle. De même à Kara, un jeune homme a déjà sorti son premier album. Comme exemple, les dimanches nous faisons des séances d’entrainement de danses traditionnelles comme « Kpadza » par exemple.’
L-FRII : Un dernier message ?
TOM LE GRIOT: ‘Un merci sincère à tous ceux qui croient en la musique traditionnelle et qui en sont passionnés. Merci pour leur soutien tant moral que financier et puisse Dieu le leur remette au centuple.’
Réalisé par Pap Jo