Des scientifiques américains viennent de décrire un nouveau genre de serpent originaire du Mexique. L’unique spécimen connu de cette espèce a été trouvé dans le ventre d’un autre serpent, il y a plus de 42 ans.
Nul besoin d’arpenter le terrain pendant de longues heures pour découvrir de nouvelles espèces! Jonathan Campbell et ses collègues, des biologistes travaillant à l’université du Texas à Arlington, près de Dallas (Etats-Unis), ont en effet identifié une espèce de serpent inconnue.
Jusqu’ici, rien d’anormal. Là où l’histoire devient cocasse, c’est parce qu’ils ont trouvé ce nouveau reptile dans le ventre d’un autre serpent. Cenaspis aenigma, le nom donné à la nouvelle espèce, est directement tiré de l’anecdote. Il signifie le ‘mystérieux serpent-dîner’ en latin. Leurs résultats ont récemment été publiés dans le Journal of Herpetology.
Un spécimen pour le moment unique
L’histoire de cette étonnante découverte remonte à 1976, il y a 42 ans. Cette année-là, des cultivateurs de palmiers travaillent au cœur d’une forêt tropicale d’un plateau isolé de l’Etat de Chiapas, au sud du Mexique. Ils tombent nez à nez avec un serpent corail, un reptile très coloré possédant un puissant venin neurotoxique.
Ils le capturent et le donnent à des herpétologues, des spécialistes des serpents. Les chercheurs découvrent alors que le dernier repas de ce reptile n’est autre qu’un petit serpent mâle d’environ 25 centimètres. En l’examinant, les scientifiques s’aperçoivent qu’il ne correspond à aucune espèce connue. Pour en savoir plus, ils partent à la recherche d’autres spécimens semblables. Malgré une douzaine d’expéditions dans la région où le serpent avait été trouvé, jamais les recherches menées n’ont été fructueuses.
C. aenigma possède des caractéristiques très particulières
Et pour cause. D’après les chercheurs, C. aenigma est probablement un serpent fouisseur, c’est-à-dire qu’il se cache sous terre pour éviter les prédateurs. Ils estiment aussi que son aire de répartition est très restreinte, ce qui expliquerait le fait qu’aucun de ces serpents n’ait jamais été observé vivant. Les insectes et les araignées constitueraient la base de son alimentation, au regard de sa modeste taille. Plus les chercheurs l’observent, plus ils se rendent compte qu’il possède d’étranges attributs.
Le serpent possède en effet des traits très inhabituels comme la forme de son squelette ou de ses écailles. Il a également 14 dents courtes et robustes sur la mâchoire supérieure, ce qui diffère de la plupart des autres serpents. « Parmi les caractéristiques inhabituelles, il y a des écailles non divisées sur toute la longueur de la queue et surtout un hémipénis simple dépourvu d’épines et complètement orné d’alvéoles », déclarent les auteurs de l’étude.
L’hémipénis est l’un des deux organes sexuels des mâles chez certains reptiles. La plupart des serpents en possèdent deux. Au repos, ils sont invaginés à l’intérieur d’une gaine dans la queue. Ces appendices servent notamment à identifier les espèces car ils sont tous différents. L’animal étudié est si différents de tous les autres serpents qu’il constitue un genre à part entière.
« Au regard de sa morphologie, C. aenigma appartient probablement aux Dipsadidae, une sous-famille de serpents de la famille des colubridés », notent les scientifiques. Toutefois, ils précisent qu’aucune des caractéristiques précédemment citées n’est connue chez un autre colubroïde de l’hémisphère occidental”. Les chercheurs ignorent si cette nouvelle espèce existe encore ou a disparu mais il est probable que le spécimen étudié possède des congénères tapis dans les forêts tropicales mexicaines.
Dans le ventre du serpent corail…
Aussi bizarre que cela puisse paraître, ce n’est pas la première fois qu’une nouvelle espèce de serpent soit découverte dans le ventre d’un serpent corail. En effet, ces reptiles rampants sont des spécialistes de la chasse aux petits serpents. Mais dans ce cas, le ‘mystérieux serpent-dîner’ n’appartient à aucun genre établi. Morale de l’histoire : de nouvelles espèces se trouvent peut-être tout près, au fond d’un bocal sur l’étagère d’un musée par exemple.
Avec Sciences et Avenir