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Julien Lepers : ses rapports surprenants avec un escroc

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D’un côté, Julien Lepers, 71 ans, animateur télé immortalisé par le jeu Question pour un champion. De l’autre côté Gontran Back de Surany, 67 ans, repris de justice multirécidiviste, condamné 19 fois au pénal, dont dix fois pour “escroquerie”, trois fois pour “abus de confiance”… Il croupit actuellement dans les geôles de la prison de Meaux suite à sa condamnation en juin dernier à trois ans de prison ferme, comme l’a révélé une enquête de Capital.

Aussi improbable que cela puisse paraître, ces deux hommes se fréquentent depuis des dizaines d’années. “Julien Lepers, je le connais depuis quarante-deux ans, c’était mon ami… Il m’a remis le pied à l’étrier et permis de retravailler avec lui…”, a assuré Surany lors de son procès à Meaux en juin dernier. Pour sa part, Julien Lepers, interrogé lors d’une enquête sur le palais des congrès de Nice, avait déclaré avoir fait la connaissance de Surany vers 1985, mais ne l’avoir revu que vers 1997. L’animateur avait ajouté que leur relation était partie d’emblée du mauvais pied. Il devait toucher 400.000 francs suite à sa participation à une opération publicitaire. Surany avait empoché ce cachet via une de ses sociétés, et fait en échange un chèque à Julien Lepers, mais ce chèque s’est avéré sans provision. Finalement, l’animateur a dit avoir récupéré seulement une petite partie (160.000 francs) de ce cachet.

Malgré cela, et malgré un contrôle judiciaire interdisant depuis 2012 à Surany de voir Julien Lepers, les deux hommes ont continué à se fréquenter et à faire des affaires ensemble. En 1999, l’animateur a par exemple investi 450.000 euros dans une autre société de Surany qui devait produire des spectacles au palais des congrès de Nice, et a ensuite perdu les deux tiers de la somme… Tout récemment, en 2019, lorsque l’animateur a animé un quizz dans les maisons de retraite pour une start-up, Julien Lepers a mis la start up en relation avec Surany, qui a empoché le cachet de l’animateur, puis disparu… Et lorsque Surany a publié il y a deux ans sous le nom de Patrick Alban un livre sur Johnny Hallyday, l’animateur en fait la promotion sur son compte Instagram. Réciproquement, Surany a aussi posté sur son Instagram des photos de ses repas avec Lepers.

Mieux : l’animateur télé a longtemps servi de gage de respectabilité à notre escroc. Ainsi, dans l’affaire du palais des congrès de Nice, Jean Guillon, le président de l’association Nice Acropolis exploitant le palais, a déclaré à la chambre régionale des comptes : “M. Surany a bénéficié de fortes recommandations de personnalités du monde du spectacle : agent de Julien Lepers, qui l’a personnellement et chaleureusement recommandé”. Surany a notamment invité le président de l’association et son épouse à une croisière d’une semaine en Méditerranée, dont la valeur a été chiffrée à 15.000 euros. Et c’est Julien Lepers qui organisait cette croisière.

Même chose dans l’affaire qui a conduit Surany à la prison de Meaux : “Surany est parvenu à donner l’illusion d’un ancrage fort dans le monde du spectacle, en apparaissant publiquement aux côtés de Julien Lepers, en suggérant le fait d’être en affaires avec ce dernier”, indique l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. “M. Surany gagnait la confiance des investisseurs en leur présentant notamment Julien Lepers”, ajoute un arrêt de la cour d’appel de Paris. Me Maud Touitou, l’avocate des victimes dans cette affaire, confirme : “mes clients ont été mis en confiance et rassurés essentiellement par la présence de Julien Lepers”.

Fait troublant : dans cette affaire, Surany, pour cacher son passé, se faisait appeler d’un faux nom, Patrick Andrieu -et cela même en présence de Julien Lepers. L’avocate des victimes précise : “mes clients ont eu plusieurs rendez-vous avec Surany où Julien Lepers était présent. Lors de ses rendez-vous, ils appelaient Surany ‘monsieur Andrieu’ devant Julien Lepers, sans que ce dernier ne s’en offusque jamais”.

Toutefois, d’un point de vue judiciaire, Julien Lepers n’a jamais été inquiété dans ces différentes affaires. Dans celle du palais des congrès de Nice, il a juste été entendu par les enquêteurs. L’association qui exploite le palais lui a bien réclamé 280.979 euros devant le tribunal de commerce, au motif que l’animateur avait investi dans la société de Surany, mais elle a fini par jeter l’éponge.

Dans l’affaire de Meaux, l’avocate des victimes admet : “mes clients ont versé de l’argent uniquement à Surany, et pas à Julien Lepers. Si Julien Lepers était présent assez souvent au début de leur rencontre avec Surany, en revanche Julien Lepers n’était plus là lorsque Surany a reçu de l’argent de mes clients”.

Contacté, l’avocat de Julien Lepers, Moad Nefati, souligne que l’animateur “n’a pas été entendu dans l’affaire de Meaux, même comme témoin”. Selon lui, “Julien Lepers est une des très nombreuses victimes de M. Surany, qui lui a soutiré près de 400.000 euros, notamment via sa société organisant des spectacles à Nice il y a plus de 20 ans. Julien Lepers a continué à fréquenter M. Surany dans l’espoir d’être remboursé de cette dette. En 2019, M Surany a encore subtilisé le cachet de 10.000 euros qu’une entreprise devait à Julien Lepers. Julien Lepers a porté plainte contre M. Surany suite à cela.”

Contactés à de multiples reprises, Gontran Back de Surany et ses avocats Vincent Lorenzi, Olivier Hillel et Nael Raad n’ont jamais répondu.